Moteur et flamme !
Quand on achète une voiture neuve, on a souvent le choix d’ajouter quantité d’options. Certaines sont utiles, beaucoup sont très chères, aucune n’est sans doute vraiment indispensable, d’où ce terme d’« options ».
Dans la foi chrétienne, la confirmation est malheureusement souvent perçue ou présentée comme une option. Car c’est bien par le baptême que nous sommes plongés dans la mort et la résurrection du Christ pour la vie éternelle : le don de la vie surnaturelle, la libération du péché originel, la filiation dans le Christ… Tout cela nous est donné par pure grâce dans le sacrement du baptême ; un don incomparable, c’est incontestable !
Alors, à côté du grand sacrement du baptême, la confirmation pourrait être vue comme facultative, secondaire ; juste une étape pour ceux qui sont allés assez loin dans le cursus catéchétique ou les rencontres d’aumônerie de jeunes ; ou une option pour ceux qui en veulent « un peu plus ».
Sauf que la confirmation n’est pas comme l’option « couleur métallisée » d’une voiture neuve ! Le baptême sans la confirmation, c’est plutôt comme acheter une voiture… sans moteur. C’est peut-être très beau, mais ça n’avance pas. La confirmation, c’est rien de moins que le moteur de notre vie chrétienne et non l’option gris métallisé qui en couvrirait la surface !
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Bien évidemment, les sacrements sont infiniment plus grands qu’une Peugeot ou une Mercedes. Les images concrètes sont toujours réductrices pour évoquer les réalités spirituelles ; mais elles nous aident au moins à en saisir les enjeux. Alors, permettez que je continue avec cette image du moteur dans la voiture.
On pourrait estimer qu’une voiture sans moteur, c’est en fait bien plus sûr. Au moins, on ne court pas de grand risque : pas de danger d’accident, pas de crainte de se tromper de route, puisqu’avec une voiture sans moteur… on fait du surplace.
Mais, le Seigneur n’a pas seulement voulu nous revêtir de sa vie par le baptême ; il a aussi voulu nous mettre en route par le don de l’Esprit de Pentecôte : une mise en route pour risquer notre vie baptismale en la confrontant au réel et aux besoins du monde par une vie missionnaire !
La confirmation n’est donc pas une option facultative ; elle est bien comme le moteur de la voiture, qui permet d’avancer dans le monde et vers les autres… et qui donne en fait au véhicule tout son sens : la voiture n’est pas voiture pour elle-même, se préservant des coups en restant tranquillement au garage. La voiture est faite pour se mouvoir, elle est faite pour se déplacer, elle permet la rencontre. Elle existe pour les autres.
Elle a donc besoin d’un moteur, la confirmation, mais aussi d’essence dans le moteur ; C’est l’Eucharistie, l’énergie de mise en mouvement. C’est pourquoi d’ailleurs, dans la logique sacramentelle, après le baptême, la confirmation précède l’Eucharistie : il faut le véhicule puis le moteur pour que l’essence permette le mouvement. Baptême-Confirmation-Eucharistie : même s’ils ne sont pas nécessairement reçus dans cet ordre, c’est ainsi que se vivent au quotidien, dans nos vies, les sacrements de l’initiation chrétienne. D’où l’importance de la messe pour raviver sans cesse les grâces du baptême et de la confirmation.
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Nous devrions donc célébrer le jour de notre confirmation comme une grande fête, aussi importante que l’anniversaire de notre naissance et celui de notre baptême. Tiens, voilà une date à bien se souvenir, voire à retrouver dans des registres paroissiaux ou un livret familial catholique : quelle est donc la date de votre confirmation ?
Je vous avoue avec une certaine honte que, pour préparer cette veillée, il m’a fallu contacter mes parents afin de savoir le jour de ma confirmation : 31 mai 1987. Je ne m’en souvenais pas ; comme quoi, traîne quand même un peu dans nos esprits l’idée que ce n’est pas si fondamental que cela, ce sacrement « optionnel. »
Certains parmi nous pensent même peut-être pouvoir s’en dispenser : ils ne sont pas confirmés et n’ont jamais eu l’idée de l’être. Ou ils ont laissé tomber le projet, parce qu’ils ne pensent plus avoir l’âge, ou que le parcours proposé par leur diocèse paraît trop long. Alors, on se contente d’une belle voiture… mais sans moteur.
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Si vous préférez une image plus en accord avec la spiritualité du Laus : je dirais que le baptême sans la confirmation, c’est comme une lampe à huile sans flamme. C’est cette lampe à huile que la Vierge Marie a voulu ici comme signe de notre disponibilité à la grâce de son Fils. La finalité de l’huile de la lampe, c’est de brûler afin que sa flamme témoigne de la présence réelle du Christ au tabernacle.
Or, il se trouve que, dans les deux grands sacrements du baptême et de la confirmation, le disciple du Christ est justement oint d’une huile, le Saint Chrême.
Au baptême, cette huile de bonne odeur vient dire que le Christ nous habite désormais totalement. Dans la deuxième lettre aux Corinthiens, Saint Paul s’en émerveille : « Nous sommes pour Dieu la bonne odeur du Christ » (2 Co 2,15). C’est un pur don de la grâce, mais si cette huile reste enfermée dans son récipient, personne ne profite de sa bonne odeur et elle devient rance.
Voici alors la Confirmation : le sacrement de la sortie du bocal, et plus encore : le sacrement de l’embrasement chrétien ! Avec la confirmation, notre huile intérieure s’enflamme du feu de l’Esprit ! Comme ici, la lampe du tabernacle : si l’huile qui s’y trouve voulait se préserver, elle ne se consumerait pas, et bientôt elle deviendrait rance. Mais sa finalité d’huile de la lampe, c’est de brûler, de se consumer, de cesser d’exister pour elle-même afin d’éclairer la présence du Ressuscité !
Frères et sœurs, nous sommes des lampes à huile du Ressuscité ! Pas des réservoirs d’huile destinés à rester bien fermés pour ne pas perdre leur contenu ni le salir au contact du monde. Nous sommes des lampes dont l’huile doit prendre des risques, pour brûler en se consumant au feu de l’Esprit. Ainsi, et seulement ainsi, nous éclairons la présence du Ressuscité dans tous les lieux du monde où il nous conduit ; nous la rendons plus perceptible, plus lumineuse. Non par notre génie personnel, mais par le feu de l’Esprit qui nous consume intérieurement !
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Belle voiture sans moteur ou lampe à huile sans flamme : choisissez l’image qui vous parle le plus, mais gardez, s’il vous plaît la conviction que la confirmation n’est pas une option.
Permettez-moi alors de terminer par quelques suggestions pour raviver en nous la force de ce sacrement.
Première proposition, peut-être particulièrement pour vous, frères et sœurs de la communauté de l’Emmanuel, qui pourriez le faire en maisonnée : fêtez vos anniversaires de confirmation ! Avec un beau gâteau garni de bougies allumées au feu de l’Esprit !
Deuxième suggestion, à vivre spécifiquement au Laus ou en emportant chez vous une fiole d’huile : s’appliquer l’huile du Laus en l’accompagnant d’un grand désir : vouloir toujours davantage, comme cette huile, vous consumer au feu de l’Esprit pour éclairer la présence de Jésus dans le monde. Elle est si belle, cette vocation qui nous est commune !
Troisième conseil, cher aux chrétiens de sensibilité charismatique mais évidemment pas réservé à eux : découvrir ou redécouvrir le sens de l’effusion de l’Esprit. Ce n’est pas une deuxième confirmation ; c’est raviver le souffle sur ce sacrement parfois un peu éteint, comme un feu qui n’est pas entretenu. Dès que l’on souffle dessus, la braise rougit et tout peut s’embraser à nouveau. Une seule Eucharistie vécue avec ferveur peut suffire à raviver ce feu ; mais vous pouvez aussi demander consciemment l’effusion de l’Esprit Saint sur votre vie : la demander auprès d’un groupe de prière, à une communauté religieuse ou à votre curé.
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Je vous souhaite que ces 3 propositions vous disposent aussi à trouver, par vous-mêmes, encore d’autres idées pour entretenir le moteur et la flamme qui nous poussent vers les autres pour leur offrir Jésus, l’Emmanuel, le Vivant ! Pour cela, invoquons avec force l’Esprit Saint :
Viens, Esprit Saint, nous mettre en marche ! Viens, Esprit Saint, mettre en nous le feu ! Alléluia !