Samedi dans l'Octave de Pâques

samedi 10 avril 2021

Par le père Ludovic Frère, recteur

Allez ! Proclamez !

Tout au long de cette octave pascale, nous assistons aux événements de ce grand jour de la résurrection : des apparitions de Jésus, des réactions de surprise, des ouvertures et des replis, des nouveaux chemins de vie… toute cette densité vécue sur quelques heures, saint Marc parvient aujourd’hui à la résumer en 6 versets seulement.

 

L’évangéliste y rapporte 3 apparitions essentielles : à Marie-Madeleine, aux disciples d’Emmaüs puis aux apôtres. Mais l’insistance est surtout sur le manque de foi des apôtres. Recevant le témoignage de Marie-Madeleine, « ils refusèrent de croire », dit saint Marc. Entendant celui des disciples d’Emmaüs, « il ne les crurent pas non plus ». Et c’est seulement quand le Ressuscité leur apparaît directement que les apôtres doivent se rendre à l’évidence de sa victoire sur le mal et sur la mort.

 

En fait, ce que le Ressuscité va reprocher demain à Thomas, il le reproche déjà aujourd’hui aux autres apôtres : « Cesse d’être incrédule, sois croyant. » « Parce que tu m’as vu, tu crois. Heureux ceux qui croient sans avoir vu. »

 

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Les apôtres sont loin d’être à la hauteur de l’évènement. Mais la puissance du Ressuscité est telle, sa miséricorde est si grande, que le reproche n’est pas sa dernière parole sur eux.

 

Le Christ aurait dû conclure son constat décevant par une forme de licenciement : « vous n’êtes vraiment pas à la hauteur ; retournez donc à vos vies de pêcheurs ou de marchands ! » Mais là, surprise ! Saint Marc rapporte bien : « il leur reprocha leur manque de foi et la dureté de leurs cœurs parce qu’ils n’avaient pas cru ceux qui l’avaient contemplé ressuscité. » Mais tout de suite après : « il leur dit : ‘Allez dans le monde entier. Proclamez l’Évangile à toute la création’. »

 

Sans transition, le Christ passe du reproche à l’envoi. Le piteux comportement des disciples ne conduit pas à leur renvoi à leur vie d’avant mais à leur envoi en mission ! Le Seigneur ne choisit pas des missionnaires parfaits, mais de pauvres hommes. Personne n’est à la hauteur de la grandeur de la Résurrection du Christ, mais elle doit tous nous mettre en mouvement !

 

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Comme si les apôtres devaient aussi entendre que les résistances qu’ils avaient vécues intérieurement, ils allaient aussi les rencontrer extérieurement en proclamant l’Évangile au monde entier ! Les résistances à la Résurrection du Christ sont en nous et dans le monde ; mais elles ne doivent pas être un frein à vivre cette Bonne Nouvelle et à la proclamer sans cesse.

 

Bien sûr, il est plus simple de se taire : dans des repas de famille, dans des discussions entre amis, il est plus simple de dire : « chacun ses croyances » que de témoigner de la victoire du Ressuscité. Mais le Seigneur nous attend tous dans un courage lucide sur les résistances rencontrées : « Allez dans le monde entier. Proclamez l’Évangile à toute la création. »

 

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Remarquez les deux verbes : « aller » et « proclamer ».

 

« Aller », c’est un mouvement, comme celui que nous voyons depuis dimanche dernier : la Résurrection du Christ met tout le monde en mouvement. Si elle nous maintient immobile, c’est que nous n’entrons pas dans son dynamisme.

 

« Allez ! » Pâques doit nous faire aller de l’avant, aller vers les autres, aller dans le concret de la vie pour y transmettre non seulement une parole sur Jésus ressuscité, mais aussi un élan de Vie ! Si chaque chrétien diffuse la dynamique de la résurrection là où il est envoyé (en famille, au travail, en association, en faisant les courses), notre monde sera plus lumineux, il sera meilleur… n’est-ce pas ce que nous devons chercher du fond du cœur ?

 

La résurrection du Christ ne peut pas simplement nous consoler de la perspective terrifiante de la mort ou de la réalité désolante de notre condition pécheresse ; elle doit tout éclairer, tout infuser… et elle ne peut le faire qu’à travers nous !

 

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Cet « aller » est donc suivi d’une autre action : « proclamer ». Non pas « faire des adeptes », mais « proclamer ». Nous avons à dire que Jésus est le vrai Dieu, unique Sauveur du monde. Nous devons le proclamer en actes peut-être plus encore qu’en paroles.

 

Le proclamer par notre sérénité face aux adversités, par notre espérance face au deuil, par notre détachement des biens matériels, par notre attention aux plus petits, par notre amour même de nos ennemis. « Proclamer » que Jésus est vivant !

 

Oui, « allez » et « proclamez » ! Qu’il n’y ait pas une fraction de seconde désormais, qui ne soit, d’une manière ou d’une autre, consacrée à annoncer :

 

Christ est ressuscité, il est vraiment ressuscité, Alléluia !