En ce jour de Noël la voix des guetteurs se fait entendre : elle porte la bonne nouvelle et annonce paix et salut. Au temps d’Isaïe, il s’agissait d’une promesse, aujourd’hui, dans la lumière de Bethléem, nous sommes les témoins de son accomplissement. Pour nous, aujourd’hui, le Verbe s’est fait chair et nous, en écho à la parole prophétique, nous éclatons en cris de joie. Parmi nous, aujourd’hui, un Sauveur est né et nous, en écho à la parole du psalmiste, nous chantons les merveilles du Seigneur.
Et, bien sûr, nous n’allons pas nous priver de partager cette joie et de la transmettre. La lumière que nous accueillons a pour vocation d’illuminer le monde. La paix qui nous est donnée a pour but de transformer l’histoire des nations, de nos familles et de nos communautés. Comme le disait déjà les apôtres, il nous est impossible de nous taire sur ce que nous avons vu et entendu. Et c’est parce qu’ils ont eu l’audace et la liberté de parler et d’offrir leurs vies en fidélité au Christ-Verbe fait chair, que nous sommes rassemblés en ce jour.
Pour que l’on ne taise pas l’annonce joyeuse de la Nativité, il nous revient de prendre la parole et de témoigner. C’est là notre mission et notre responsabilité. Nous constatons qu’il est urgent pour nous et pour le monde d’accueillir la Parole du Christ, qui est Vérité et Vie, et de nous laisser transformer par elle. Par le Verbe, tout est venu à l’existence, nous dit saint Jean. Comme l’écrit saint Irénée au IIe siècle, le Verbe de Dieu s’est fait fils de l’homme, pour habituer l’homme à recevoir Dieu, et habituer Dieu à habiter en l’homme. C’est par lui que notre monde peut découvrir ce qui donne goût et sens à notre vie : aimer, partager, accueillir, dialoguer, pardonner, marcher et construire ensemble… Le Verbe est la lumière des hommes. Mais nous sommes encore trop souvent écrasés par les ténèbres de la violence, de la guerre, de l’injustice, de la séparation, de l’exploitation, du mépris et de l’indifférence.
Jean le Baptiste a été envoyé comme témoin, pour rendre témoignage à la Lumière. Aujourd’hui, à sa suite, nous sommes à notre tour envoyés comme autant de témoins pour transmettre la même Lumière : le Christ qui se fait l’un de nous et qui habite parmi nous. Rendre témoignage n’est pas simplement une option pour nos temps libres. Tout baptisé est par vocation un témoin et, parce qu’il est témoin, il est aussi missionnaire. Notre vie, nos paroles, nos engagements, manifestent la présence de Celui qui vient demeurer parmi nous. Comme Jean-Baptiste, nous montrons l’Agneau de Dieu ; comme les bergers nous racontons ce qui nous a été dit au sujet de l’Enfant né à Bethléem. À nous maintenant d’entraîner nos frères et sœurs pour qu’ensemble nous soyons des Pèlerins d’espérance.
Nous sommes un peu comme les guetteurs dont nous parlait le prophète Isaïe. Nous sommes venus voir Jésus, le Don du Père, et tous ensemble nous crions de joie, nous élevons la voix pour appeler nos frères et sœurs à vivre la même rencontre. Dans cet Enfant-Verbe fait chair, nous contemplons, en reprenant les mots de la lettre aux Hébreux, le rayonnement de la gloire de Dieu. Dans sa fragilité et son abandon entre nos mains, il porte l’univers par sa parole puissante. C’est lui la vraie Lumière, qui éclaire tout homme en venant dans le monde. C’est cela le mystère de l’Incarnation : Dieu qui vient dans notre monde, qui habite parmi nous et qui nous donne de pouvoir devenir enfants de Dieu. Le Fils unique nous est donné pour que nous vivions pleinement et au grand jour notre vocation d’enfants bien-aimés du Père. Comme l’écrit un commentateur du IXe siècle : Ce n’est pas dans son propre intérêt que le Verbe s’est fait chair, mais dans le nôtre, car, sans l’incarnation du Verbe, jamais nous n’aurions pu être transformés en enfants de Dieu (Jean Scot, Homélie sur le Prologue de Jean, SC 151, 295C). Ce désir de Dieu est le plus inclusif qui soit car le Seigneur veut faire de toute l’humanité une seule famille au sein de laquelle les particularités de chacun sont respectées, tout en veillant à la communion entre tous. Jésus ne naît pas dans notre chair pour ne s’occuper que de celles et ceux qui deviendront chrétiens. Il est le salut préparé à la face des peuples : la lumière qui se révèle aux nations (cf. Lc 2,31-32), l’unique Sauveur de toute l’humanité, le terme de l’histoire humaine, (…) la joie de tous les cœurs et la plénitude de leurs aspirations (GS 45,2). N’oublions pas que nous sommes les dépositaires d’un bien qui humanise, et qu’il n'y a rien de mieux à transmettre aux autres (Pape François, La joie de l’Évangile, n° 264).
En ce jour de Noël, décidons ensemble de faire une place au Fils de Dieu là où nous vivons et dans tout ce que nous vivons. Laissons-Le nous rejoindre et partager avec nous l’itinéraire de notre quotidien, et nous deviendrons des pèlerins de l’espérance. Avec Marie et Joseph, reconnaissons en Lui la bonne nouvelle, qui sera une grande joie pour tout le peuple. Il est le Don de l’amour du Père et il nous fait connaître le Père. En Le regardant, nous contemplons la gloire de Dieu, la gloire qu’il tient de son Père et qu’Il nous transmet.
Joyeux et saint Noël ! Aujourd’hui, un Enfant nous est né, un Fils nous a été donné !