Homélie du troisième dimanche de Pâques

dimanche 23 avril 2023

Par le Père Brice Miguel Mekongo

« Ils racontaient ce qui s'était passé sur la route et comment le Seigneur s'était fait reconnaître à la fraction du pain ». 

A mesure que l’on s’éloigne du jour de Pâques, notre ferveur peut commencer à baisser. Certains parmi nous peuvent commencer à s'affadir. Ils se demandent si le Christ est vraiment ressuscité parce que depuis là leur quotidien n’en est pas transformé. Le témoignage des évangiles et des autres chrétiens ne leur suffit plus ; ils veulent faire l'expérience du ressuscité dans leur vie pour continuer à croire et à se réjouir de la résurrection. Si vous êtes, aujourd’hui dans de telles dispositions, sachez que l’Évangile, la Bonne Nouvelle que l'on vient de proclamer est pour vous. Saint Luc nous propose l'expérience des deux disciples d’Emmaüs pour nous dire que nous pouvons nous aussi rencontrer le ressuscité, et il nous dit dans quelles circonstances nous pouvons le rencontrer.

Voici deux disciples qui ont été proches de Jésus de Nazareth. Ils le connaissaient très bien : « Jésus de Nazareth, cet homme (…) était un prophète puissant par ses actes et ses paroles (…). Nous, nous espérions que c’était lui qui allait délivrer Israël ». Ils le connaissaient bien ; ils connaissent ce qu'il a fait et enseigné, mais décident de s’éloigner de la communauté avec des leurs attentes qui ont été déçues. Ils ont visiblement perdu toute espérance que quelque chose de nouveau peut surgir dans leur vie. Il leur manque la foi en la résurrection : devant le Messie crucifié, ils ont perdu la foi et n’ont pas pris en compte la nouveauté, la surprise de Dieu.

Bien-aimés du Seigneur, dans les moments de crise, lorsque les chrétiens vivent la déception,  subissent la moquerie des autres et sont marginalisés et discriminés, il n'est pas rare de les voir abandonner leur communauté chrétienne ou ses valeurs. « Nous, nous espérions que c’était lui qui allait délivrer Israël » ; on ajouterait aujourd’hui : « Ah ! J’espérais qu’il rendrait ma vie plus simple et plus joyeuse », « j’espérais ne rencontrer que des anges et des saints dans ma paroisse ou ma communauté », « j'espère qu’en me mariant à l’Église, mon mariage serait un long fleuve tranquille ». Dans ce type de tourment, il y en a qui s’éloignent des assemblées eucharistiques, qui renoncent à vivre l'idéal chrétien dans leur couple et leur famille, qui renoncent à la prière et à la charité.

Parce que n'ayant pas goûté aux grâces de la résurrection, tu as décidé de t’éloigner, d’aller voir ailleurs ou alors tu es tenté de le faire. Sache que dans de telles situations de profonde confusion, le Ressuscité s'approche de ses disciples qui croient seuls pour leur donner de réaliser qu’il fait route avec eux ; il les accompagne, il synchronise ses pas aux leurs, il va à leur allure ; et ça n'est pas un scoop, parce que le Ressuscité est toujours auprès de ses disciples et fait route avec eux comme il a promis au dernier verset de l’évangile selon saint Matthieu : « moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde » (Mt 28, 20). Il est présent auprès de nous tous et même de ceux qui se sont éloignés de nous et de la communauté. Si nous pensons être seuls en ce moment où les choses vont mal dans nos vies, je voudrais  vous faire la joyeuse annonce que le Christ, lui, est toujours là, cheminant à nos côtés ; et il est particulièrement proche de ceux qui sont déçus et blessés.

Cependant, Jésus à nos côtés nous révèle l’origine de nos amertumes et de nos confusions : « Esprits sans intelligence ! Comme votre cœur est lent à croire tout ce que les prophètes ont dit (…), il leur interpréta, dans toute l’Écriture, ce qui le concernait ». Les deux disciples d’Emmaüs n’ont pas cherché à comprendre ce qu'ils vivaient la lumière de la Parole de Dieu. Ils ont continué entretenir leurs rêves et leurs attentes qui n'étaient pas ceux de la Parole de Dieu.

Chers frères, chères sœurs, les drames de nos vies sont terribles, ce qui arrive à nos familles est inqualifiable, insoutenable et cela nous fait perdre espérance. Cependant, si nous les lisons à la lumière de la Parole de Dieu, le sens de nos épreuves change. La lecture et la méditation de la Parole de Dieu, la liturgie de la Parole dans la Sainte Eucharistie, donne un sens nouveau aux évènements que nous vivons et nous redonne espérance en nous ouvrant à la Bonne Nouvelle. « Notre cœur n’était-il pas brûlant en nous, disent les disciples d’Emmaüs, tandis qu’il nous parlait sur la route et nous ouvrait les Écritures ? » Pourquoi la liturgie de la Parole précède-t-elle celle eucharistique ? Parce que pour que nos yeux s’ouvrent à la présence du Ressuscité, il est important que notre cœur s’ouvre par la Parole de Dieu, qu’il soit brûlant comme ceux des disciples d’Emmaüs.

Et puis arrive enfin le moment où les yeux des disciples s'ouvrent pour voir le Seigneur, pour le reconnaître : c’est à la Fraction du pain. La Fraction du Pain est une expression technique qui désigne l’eucharistie. Nous n’avons pas, comme les premiers Apôtres, touché le Ressuscité. Cependant, nous avons l’eucharistie où le Christ se donne à toucher ; où toute sa vie nous est donnée pour être assimilée : « ceci est mon Corps, ceci est mon Sang ». Dans l’eucharistie, sa Vie donnée n’est pas détruite, elle est transformée. Jésus n’est pas un cadavre, il est vivant par sa vie donnée dans l’eucharistie.

En sortant de cette messe, voilà ce que nous devons proclamer à notre monde qui désespère. Il a le dernier mot sur la mort, sur nos soucis, nos épreuves… et ce dernier mot, c’est sa Résurrection. Il est Ressuscité et présent dans l’Eucharistie.

Loué soit Jésus-Christ !