Le temps de Noël nous offre de belles grâces de paix, de joie, de douceur. Mais les grâces offertes ne sont jamais une propriété privée. La Vierge Marie, en ce lieu béni, a su distribuer toutes les grâces qu’elle a reçues.
C’est dans cette perspective de grâce que l’Eglise nous offre de nous attarder en ce dimanche sur la sainte Famille de Jésus, Marie et Joseph. Une famille bien particulière, je vous le concède. Une famille unique pour le Fils unique de Dieu. C’est pour nous l’occasion de tourner nos regards d’abord vers Joseph. Il a obéi à l’ange et pris chez lui Marie. Il a obéi à la Loi en acceptant d’accueillir sa femme enceinte par l’action de l’Esprit saint. Il part avec elle, fragile et porteuse de toute l’espérance du monde, pour se faire recenser à Bethlehem, son village d’origine. Il est de la descendance de David et Jésus sera bien fils de David par Joseph. Reprenant la route, obéissant à la parole de l’ange, il fuira en Égypte pour protéger sa femme et l’enfant qui leur est confié par Dieu.
Dans la prière, j’aime entrer dans le regard de Joseph. Il aime sa femme. Il aime Dieu qui a pris le visage de Marie, celle qu’il chérit. Il sait le lien tout particulier qu’il y a entre Dieu et son épouse. Et il contemple l’Enfant et sa mère avec l’amour et le respect que l’on doit à Dieu seul. Joseph, c’est l’homme de l’intériorité, du silence et de l’obéissance à Dieu. Joseph est si humble… La servante du Seigneur reçoit donc comme époux l’homme, le plus humble, le plus contemplatif, le plus aimant.
Travailleur et discret, uni à Dieu en toute chose, il a accepté d’entrer dans le projet fou de Dieu. A la crèche, il a accueilli les bergers et le voisinage, sans doute, et le voilà heureux de retrouver le silence qu’il aime, contemplant Marie et Jésus, dont il a la garde. Trésor fragile et précieux. En Marie, il contemple le mystère de la femme comme chaque époux est invité à le faire. Avec la douceur des hommes solides et paisibles, il a la plus noble des tâches. Il doit exercer sa paternité dans une chasteté absolue. La chasteté ne consiste pas à brimer les relations. Elle n’est pas spécifiquement liée à la continence. Être chaste, c’est avant tout laisser l’autre libre, ne jamais le considérer comme notre propriété. Être chaste, c’est être entièrement voué à la croissance de l’autre, ne pas mettre la main sur lui ou sur elle. Ainsi, la chasteté n’est pas là apanage des religieux. Le religieux est appelé à vivre un célibat chaste. Les époux sont invités à un amour chaste. Car chaque baptisé est appelé à cultiver la chasteté : chasteté dans le rapport à la nature, dans le rapport à la nourriture, dans le rapport à tous les biens matériels et dans le rapport aux personnes. Ainsi, la chasteté est un détachement qui fait grandir l’amour véritable. Elle n’enferme pas, elle suppose un détachement qui n’enferme pas dans la solitude. Ainsi, il s’agit d’une attitude spirituelle, bien plus riche que le respect. C’est cet amour chaste dont est pétri le cœur de Joseph. Époux de Marie, il est au service de la croissance de la grâce en elle.
Marie, de son côté, ne met la main ni sur Joseph ni sur son Enfant. L’Évangile d’aujourd’hui en est le témoin. En elle, la chasteté est le fond de son bonheur. Le Magnificat en est l’expression la plus sublime.
Jésus, enfin, aime ses parents, et tous ceux qu’il croise, avec cette distance marquant l’infinie délicatesse de Dieu qui respecte la liberté de chacun. En Dieu l’Amour est sublimement chaste.
Par la chasteté, l’amour est toujours plus authentique. Un amour qui ne pèse pas sur l’autre, un amour qui laisse libre.
En ce sens, la sainte Famille irradie l’amour de Dieu , car au cœur de cette famille resplendit la sainte liberté des enfants de Dieu. Chacun est si pauvre de lui-même que l’autre devient toute sa richesse.
La chasteté mal comprise et moquée par nos sociétés dites évoluées, n’a laissé place bien souvent qu’à une relation égoïste qui a abîmé le lien social et plus profondément encore, l’amour familial.
La chasteté ouvre donc un chemin spirituel à tous les états de vie. Certes, aimer l’autre sans retour sur soi-même est un chemin difficile et exigeant. La sainte Famille est un exemple de ce chemin d’amour où tout est donné et où tout est reçu.
À l’aube d’une année nouvelle, la fête de ce jour n’est-elle pas l’occasion de réviser la qualité de nos relations familiales ? La chasteté en toute chose sera toujours un chemin de libération et de croissance spirituelle. Il serait bon d’y réfléchir