6e dimanche du temps ordinaire

dimanche 13 février 2022

Par le père Brice-Miguel Mekena Mekongo, vice-recteur

« Heureux, vous les pauvres, car le royaume de Dieu est à vous (…) Mais quel malheur pour vous, les riches »

Frères et sœurs bien-aimés, la logique humaine nous fait souvent dire « heureux sont ceux qui sont riches, qui ont tous les biens disponibles ; Heureux ceux qui sont en bonne santé et qui peuvent jouir de la vie ; Heureux ceux qui savent se faire respecter ». En leur disant qu’elles sont heureuses, nous entendons complimenter les personnes qui ont une situation jugée enviable.

Cependant, dans la Bible, la béatitude n’est pas un simple compliment, c’est surtout une façon d’indiquer comment atteindre l’objectif que chaque homme se fixe dans la vie ; et que désire l’homme dans la vie : la joie, le bonheur. La béatitude est donc la marche à suivre pour ne pas se tromper de chemin et parvenir au Bonheur. Dans l’Ancien Testament, on retrouve environ 44 fois l’expression heureux, surtout dans le livre des psaumes qui commencent d’ailleurs par une béatitude : « Heureux est l'homme qui n'entre pas au conseil des méchants » (Ps 1,1a), nous l’avons chanté tout à l’heure dans le psaume de ce jour. Lorsque le psalmiste le proclame ou encore lorsqu’il dit par exemple que « Heureux les hommes intègres dans leurs voies qui marchent suivant la loi du Seigneur ! » (Ps 118, 1), il entend inculquer les valeurs sur lesquelles il faut miser pour réaliser sa vie et parvenir à la vraie joie.

Seulement dans la vie, il n’y a pas que la béatitude, parce que l’on peut opérer des choix pour parvenir au bonheur, mais se retrouver dans la désolation parce que l’on s’est trompé de chemin. S’impose alors la nécessité de mettre l’homme en garde contre ces chemins qui mènent à la désolation. Voilà pourquoi nous avons dans les Saintes Ecritures des expressions telles que : « Maudit soit l’homme » comme nous avons entendu dans la 1ère lecture tirée du livre du prophète Jérémie « Ainsi parle le Seigneur : Maudit soit l’homme qui met sa foi dans un mortel », Et Jésus dit souvent dans l’Évangile : « Malheur à vous ! » (malheur à toi Corazin, malheur à toi Bethsaïde, malheur à vous Scribes et Pharisiens hypocrites, malheur à l’homme par qui le scandale). Ce ne sont pas là des menaces de châtiment de Dieu qui nous ferait payer certains comportements. Non ! C’est le cri de douleur d’un père qui est Dieu qui voit ses fils s’égarer et qui ne sera jamais heureux des choix qu’ils opèrent et qui sont contraires à ses orientations.

« Heureux, vous les pauvres, car le royaume de Dieu est à vous (…) Mais quel malheur pour vous, les riches »

Dans la Bonne nouvelle de ce jour, Jésus adresse cette béatitude à ses disciples qui ont tout abandonné pour ne se fier qu’à lui : « Heureux, vous les pauvres, car le royaume de Dieu est à vous ». Il ne déprécie pas la richesse, parce que ce n’est pas ici une question de portefeuille. Mais il révèle que les pauvres, les anawim qui ont tout laissé pour n’espérer qu’en Dieu sont citoyens de ce Royaume où toutes les pauvretés disparaissent parce que personne n’y accumule pour soi, mais tout le monde met à disposition du frère ce qu’il a.

Bien aimés du Seigneur, je me permets de reprendre cette béatitude pour nous tous ici présents qui avons abandonné la sécurité et la chaleur de nos propres maisons pour venir rencontrer le Seigneur sous le manteau de la Vierge du Laus, la bienheureuse qui a cru : « Heureux, vous les pauvres, car le royaume de Dieu est à vous ». Mais je ne vous cache pas mon inquiétude. Je me demande si nous resterons citoyens de ce royaume une fois cette eucharistie achevée en retrouvant la sécurité de nos maisons. Sommes-nous prêts à poursuivre cette expérience de pauvreté librement consentie pour demeurer dans le royaume de Dieu ? La question est alors : quelles certitudes, sécurités, assurances je dois librement consentir à lâcher pour voir grandir la certitude que Christ est avec moi, pour avoir dans son cœur et dans sa vie plus d’espace pour Dieu.

 « Heureux, vous les pauvres, car le royaume de Dieu est à vous ».

A l’occasion de la journée mondiale du malade, chers Frères et Sœurs qui portez les signes de la maladie et du handicap, permettez-moi au nom de Notre Sauveur, Jésus-Christ, de vous adresser cette béatitude. Comme vous le savez sans doute notre Dieu a un faible pour les faibles. Heureux êtes-vous donc, vous qui êtes pauvres en santé, qui avez faim et soif de santé, dans votre situation douloureuse vous donnez la possibilité à l’Église et au monde de vérifier ces paroles de l’apôtre : « Ce qu’il y a de faible dans le monde, voilà ce que Dieu a choisi, pour couvrir de confusion ce qui est fort » (1 Co 1, 27) !

Heureux êtes-vous parce que vous êtes les bénéficiaires privilégiés du sacrement de la tendresse infinie que Dieu réserve aux personnes qui souffrent ou sont exclues : l’onction des malades. Par ce sacrement, le Christ, votre seule vraie sécurité, vient vous apaiser, vous redonner confiance, vous fortifier moralement pour vous aider à traverser l'épreuve de la maladie et à demeurer attentifs à aimer ceux qui vous entourent. Mais permettez-moi de vous rappeler cette exhortation de l’apôtre que nous avons suivie dans la 2ème lecture de ce jour : « Si nous avons mis notre espoir dans le Christ pour cette vie seulement, nous sommes les plus à plaindre de tous les hommes ». Nous pouvons y voir un appel à élargir la perspective de notre espérance jusqu’à la vie éternelle en nous engageant à lutter pas seulement contre le mal physique, mais aussi et surtout contre le péché qui est rupture de communion avec Dieu.

Bien-aimés du Seigneur, célébrer ce sacrement en pleine assemblée eucharistique est pour moi le signe que c’est toute l'Église qui doit être "sacrement" de l’amour du Dieu Sauveur, au service des malades et de tous. Puisse le Seigneur renouveler la manière dont nous situons les malades dans nos familles et communautés respectives, c’est-à-dire, à la première place.

Marie, salut des infirmes et consolatrice des affligés, prie pour nous.