Homélie du 28 ème dimanche du temps ordinaire

vendredi 13 octobre 2023

Par Le Père Michel Desplanches

 

Le ciel pleure. Le ciel pleure et nous pleurons avec lui, accablés par le poids de l’horreur, révulsés par la violence insoutenable que nous imposent les heures que nous vivons.

Oui, des larmes, rien que des larmes… mais des  larmes  tellement nécessaires. Bien sûr, elles ne suffisent pas à apaiser notre soif de justice. Mais, avant toute chose, c’est un cri de détresse qui doit jaillir du fond de notre humanité blessée et du fond  de notre prière. C’est le  cri de détresse et d’horreur qui raisonnait à Jérusalem le vendredi saint sur le Golgotha à la neuvième heure. Cri d’angoisse, cri de douleur, passage terrifiant qui a scellé  dans le sang de notre Dieu l’alliance éternelle de la vie et de l’amour. Paradoxe bouleversant de la foi chrétienne.

L’Évangile de ce jour nous parle de mariage, alors que l’actualité nous plonge dans l’effroi et le deuil. Mais le Dieu de l’alliance ne cesse d’inviter. Il tend sans cesse la main aux hommes qui se détournent de lui. Oui, les hommes tournent le dos à la vie et à l’amour. Dieu offre sa vie crucifiée, mais il le fait dans la solitude et l’abandon.

Notre culture de la distraction est désarçonnée par la barbarie primaire qui éclate sur la terre même où Dieu a fait alliance avec l’humanité. Ce Dieu qui a tout essayé  avec les patriarches et les prophètes, ce Dieu qui a tout donné jusqu’à se faire l’un de nous, ce Dieu en ce jour, se retrouve seul dans la salle des Noces.

L’innocent égorgé, l’innocent torturé, l’innocent emprisonné, pour nous, ce sera toujours  le Christ car  Dieu a toujours le visage de l’humilié, du petit, du rejeté. À l’heure où va se discuter un projet de loi dramatique autorisant de mettre à mort les vieillards et les grands malades, à l’heure où les avortements explosent dans notre pays, à l’heure où les naissances ne cessent de baisser dans les familles françaises, il nous revient de laisser partout briller la lumière de la vie et de l’amour. Le sourire d’un nouveau-né, le regard lumineux d’un vieillard en fin de vie, l’amour d’un homme et d’une femme, ce n’est pas de l’idéologie! C’est la vie, la vie dans toute sa splendeur et sa simplicité. Tout ce qui est possible n’est pas forcément moral, sur le plan de la guerre comme sur le plan médical, nous le savons. La seule vraie question reste celle-ci :  Qu’est-ce qui construit l’humanité,  sinon l’infini respect de l’autre, du plus faible, de celui qui n’a pas de voix? Les invités les plus chics n’ont pas voulu venir célébrer l’alliance ? Qu’importe ! Le roi invite tous ceux et celles que l’on croise en chemin: les aveugles et les boiteux, les lépreux et les pécheurs, les prostituées et les trafiquants. Tous ces invités peu recommandables ont revêtu l’habit de fête, tous  ils ont accepté de changer de vie et de trouver place  dans la salle des noces. Rejoignons-les à la table du roi pécheurs que nous sommes. Celui qui n’aira pas revêtu le vêtement de la justice et de l’amour n’y aura pas sa place. 

 En ce jour, l’eau de nos larmes se mêle au sang sauveur. Dieu se fait nourriture et boisson de salut. Au pied de la croix, la puissance de vie du Ressuscité s’offre au banquet des Noces de l’Agneau.

Le Crucifié se livre tout entier à l’amour de son peuple. L’horreur et la souffrance n’auront jamais le dernier mot, car le cri de Jésus résonne dans l’éternité comme un cri d’amour pour l’humanité.

Nous en témoignerons à temps et à contretemps aux côtés de toute victime.

L’actualité si sombre de notre temps nous pousse à un surcroît de foi et d’espérance. Relevons ce défi aux profondeurs de notre âme dans une inébranlable confiance en celui qui s’est fait notre Époux t jamais.

 

Père Michel Desplanches

Recteur