Une fois de plus, Jésus annonce sa Passion, et une fois de plus, il n’est pas compris par ceux-là même qu’il a appelés. Car attention ! Il ne s’agit pas pour Jésus de prédire l’avenir ou de dévoiler son destin.Non, ici il révèle son identité profonde. Quel est donc ce Dieu, qui se révèle aujourd’hui devant nous ? Quel est ce Dieu qui, en Jésus, échoue si lamentablement, qui ne trouve pas d’autres compagnons que ces pêcheurs, sans instruction et vaniteux? Quel est donc ce Dieu qui, en Jésus, est vaincu par la caste des théologiens politiciens , ce Dieu auquel on intente un procès et qui est condamné comme illuminé et révolutionnaire ? Jésus nous a répondu dans l’Evangile: «Qui m’a vu, a vu le Père ». Mais notre raison bute sur l’incompréhensible Passion du Fils de Dieu. Notre raison doit donc renoncer à l’idée qu’elle se fait de Dieu. Et il faut se poser la question : Que doit donc être Dieu pour qu’il se donne une pareille existence ? ». Et la réponse n’est pas un discours, la réponse, c’est la vie et la mort de Jésus : Dieu est amour. Mais attention! Derrière ce mot ne plaçons pas tout de suite du sentiment. Derrière ce mot, Dieu place avant tout l’humilité. L’humilité de Dieu est un abîme d’amour qui ne connaît pas de fond.
Qu’un petit s’incline devant la grandeur de l’autre, c’est bien normal. C’est la première des loyautés. Mais que le grand se courbe devant le petit, ça c’est l’amour dans toute sa liberté et sa puissance. Dieu est grand car il est si petit! C’est le sens de la parabole « a . Dieu est grand, car il est si petit. C’est le sens de la parabole « actée » de l’enfant que Jésus, place au centre du groupe des apôtres. Ne nous y trompons pas, Jésus ne met pas en avant l’innocence présumée de l’enfant. Cette innocence n’apparaît qu’à l’époque romantique. Dans l’Antiquité, l’enfant n’est rien. Il n’a aucun droit, aucune propriété. Il se définit par le rien, l’incapacité et la dépendance. Pour dire Dieu, Jésus montre un enfant. car si Dieu est amour, Dieu est humilité, dépendance, pauvreté. Et comme un pauvre, le Seigneur veut trouver en nous sa joie. Trouver sa joie en l’autre, c’est aimer, vouloir être « par l’autre » et « pour l’autre ». « Par l’autre », c’est l’accueil. «Pour l’autre », c’est le don. Les deux aspects sont pauvreté et dénuement. C’est bien ce qui se passe en Dieu Trinité : tout est accueil, et don réciproque. Le Père se donne au Fils, et le Fils se donne au Père. Et ce dont réciproque c’est l’Esprit Saint , le don de Dieu, le père des pauvres.
Ainsi donc, Dieu est pauvreté en son intimité. Et cette pauvreté suppose la dépendance. Aimer, c’est vouloir dépendre de l’autre. Vouloir dépendre, c’est cela l’Etre de Dieu. Voilà ce que Jésus nous découvre dans cette page d’évangile. Dieu n’a pas besoin de nous comme un enfant a besoin de sa mère. Cette dépendance est une tension vers l’autre, une attention à l’autre comme une mère pour son enfant. L’amour de Dieu et sans condescendance. Sa puissance sera d’être humble serviteur, de se donner jusqu’au bout . Nous sommes aimés jusque-là !
Cher frères et soeurs, Benoîte Rencurel, par toute sa vie, incarne ce passage d’évangile. Elle n’est personne, elle n’a rien, elle n’a reçu aucune instruction, elle est pauvre à l’image de Marie.
Caché dans un repli de cette vallée des Alpes, notre sanctuaire, depuis 360 ans, chante l’humilité de Dieu qui est sa plus grande gloire. Par amour pour nous, il s’est possédé de tout l’apparat de sa puissance pour mieux nous aimer, pour mieux nous sauver.
Que cet amour incompréhensible qui a comblé l’âme de Benoît illumine nos cœurs en ce lieu qui nous révèle l’humilité de Dieu. Nous sommes aimés au-delà de tout ce que nous pouvons concevoir ou imaginer. Et ici, cet amour se donne dans la douceur et l’humilité.