En ces temps toujours plus instables et inquiétants, il nous est bon de fixer notre regard sur Jésus, dans cet épisode de guérison. « Encore, une guérison ! » diront certains Mais oui,! Car nous avons tous, sans exception, des blessures à guérir, d’inconsolables chagrins, des soucis récurrents. Face à sa créature qui souffre, Jésus ne reste pas loin. Il n’est pas prisonnier d’une gloire inaccessible, enfermé dans sa toute-puissance. Au contraire, il vient. Il ne cesse de venir à notre rencontre, qui que nous soyons, et où que nous soyons. Nous le voyons ici traverser Tyr, Sidon, et la Galilée, carrefour des nations et foyer d’impureté rituelle pour les juifs , car Jésus va au contact de ceux qui sont loin, de ceux qui peinent au chemin de la vie.
C’est pourquoi nous avons besoin de réentendre ces récits de guérison car notre Dieu ne vient pas pour nous écraser par sa gloire. Il ne reste pas caché derrière un nuage! Il met en œuvre sa puissance pour sauver ceux qui sont le plus loin. Dieu est proche.
La souffrance, le handicap, la solitude, autant de situations qui risquent de nous replier sur nous-mêmes. En effet, lorsqu’on souffre, toutes nos facultés se concentrent sur notre souffrance. Alors, nous fermons la porte à toute communication . Nous nous murons dans le silence et l’isolement.
Beaucoup de pèlerins font ici l’expérience de la proximité du Sauveur. Mais souvent, cette expérience ne s’exprime que sous la forme d’un sentiment (« J’ai senti que le Seigneur était là »). Mais attention! Nos sens peuvent toujours nous tromper et la rencontre avec Jésus n’est pas d’abord un sentiment. Rencontrer Jésus, c’est avant tout aller avec lui « à l’écart ». Jésus a besoin d’intimité pour se livrer, pour exercer sa mission. N’est-ce pas là ce que nous sommes venus chercher ici : être à l’écart avec Jésus pour le laisser agir en nous ? Pour le rencontrer en vérité ?
L’Évangile de ce jour nous montre bien qu’il ne s’agit pas, dans ce récit, de décrire un soin prodigué par un guérisseur. Que fait Jésus ? Il lève d’abord les yeux vers le ciel. C’est du Père céleste qu’il reçoit tout. Il est le Fils, éternellement tourné vers le Père. C’est par le Fils que le Père veut agir, et dans l’Esprit d’amour qui les unit. C’est pourquoi Jésus lève les yeux vers son Père. Ensuite, nous le voyons, soupirer. Ce souffle de vie du Christ, c’est l’Esprit du Père et du Fils qui nous est offert.
Nous n’assistons pas ici, à une simple séance de guérison qui nous montrerait que Jésus est gentil avec les malades !
Ici, c’est Dieu dans la toute-puissance de sa gloire, Père et Fils dans l’Esprit , qui vient au secours de l’homme, sourd et muet, muré dans sa souffrance.
Non, Jésus n’est pas un brave guérisseur itinérant qui fait des prières. Il est le Fils, l’Unique, Celui-là seul par qui le Père manifeste sa proximité et son amour pour ceux qui peinent. Jésus n’est jamais seul. Il se reçoit du Père et agit dans l’Esprit. C’est bien ce que ses contemporains refusent de comprendre. Par Jésus, en effet, c’est toute la plénitude de Dieu qui s’offre à nous et qui nous dit : « Ouvre-toi ! » . Écoute ton Dieu avec tes oreilles et avec ton cœur. Proclame sa gloire avec ta bouche et par toute ta vie. Car c’est cela ta vocation : écouter Dieu et transmettre aux autres les merveilles de Dieu.
À l’heure où tout le monde crie, sans écouter personne, toi, écoute et proclame l’Évangile de la vie et de la joie. Ouvre-toi, libère tout l’amour qui est comprimé en toi. Le Sauveur vient vers toi pour te libérer, pour te sauver.
Ici, à l’écart, « loin de la route », comme le dit l’Évangile, Jésus vient te guérir, ouvrir pour toi des chemins de vie et de paix. Il t’offre une vie nouvelle. Il brise ta solitude. Il t’introduit dans une communauté de frères et de soeurs. Ici, depuis 360 ans, l’Eglise se construit sous le regard maternel de la Vierge du Laus. Car, avec Jésus, toute grâce personnelle contribue à l’édification de l’Eglise pour la gloire du Père dans la joie de l’Esprit-Saint. Amen.
Père Michel Desplanches
Recteur