Alors que l’Eglise entière fête dans un même élan les apôtres Pierre et Paul, de nombreux diocèses se rassemblent joyeusement pour l’ordination de nouveaux diacres ou prêtres.
Il n’y a pas beaucoup de fêtes de saints qui l’ emportent sur le dimanche ! Il s’agit donc là d’une fête importante qui peut donner du sens à notre vie chrétienne.
Pierre et Paul, les deux colonnes de l’Eglise, ne sont pas des héros que l’on commémore à la fin du mois de juin. Ils sont d’abord des témoins de l’Évangile, dont la vie et la mort ne cessent d’inspirer de siècle en siècle tous les chrétiens.
En ces temps troublés où l’horreur du péché, de la haine, de la violence, de l’abus sont éclairés d’une lumière crue, nous proclamons sainte l’Eglise chaque dimanche. En effet, nous savons qu’elle est, quoi qu’il arrive, le corps très saint du Christ et que jamais« les portes de la Mort ne l’emporteront sur elle. » Jésus nous l’a promis et sa parole est certaine.
En quoi donc le témoignage des apôtres Pierre et Paul peut-il nous aider à vivre aujourd’hui notre foi chrétienne dans l’Eglise?
Pierre et Paul sont deux hommes bien différents dont le parcours spirituel n’est pas comparable. Les voici pourtant unis dans une même fête aujourd’hui, car l’un comme l’autre, ils sont allés au bout du chemin de l’amour à l’image du Christ. Tous les deux sont morts à Rome, l’un crucifié la tête en bas, dit-on, et l’autre décapiter, car Paul, étant citoyen romain, ne pouvait être crucifié. "Le sang des martyrs est une semence de chrétiens", dit un vieil adage. Si nous sommes ici aujourd’hui, c’est donc parce que ces hommes ont donné leur vie pour le Christ. Trois mots me semblent marquer l’héritage que nous laisse Pierre et Paul.
Le premier mot qui monte à ma prière en pensant à ces hommes, c’est la fermeté. Oui, ces hommes ont été fermes dans la foi, solides, inébranlables. Nous qui sommes habitués à des des demi-vérités, toujours changeantes, à des opinions décousues, à des témoins corrompus, cette fermeté de Pierre et de Paul nous fait du bien. Ce n’est pas pour rien que Simon a été surnommé Pierre par Jésus. Nous pouvons nous appuyer sur sa foi. Il est un roc intangible. Écoutons Paul, lorsqu’il nous dit : « Désormais, je considère tout comme désavantageux à cause de la supériorité de la connaissance du Christ Jésus mon Seigneur. À cause de lui, j’ai accepté de tout perdre, je considère tout comme déchet, afin de gagner le Christ et d’être trouvé en lui. » Ces hommes n’ont rien mis au-dessus du Christ. Leur vie elle-même a été soumise au Seigneur jusqu’au bout. Oui, la fermeté dans la foi est certainement le premier message que nous avons à retenir des saintes Pierre et Paul.
Le deuxième mot qui me semble les caractériser, c’est l’audace. L’un comme l’autre aurait pu reprendre sa petite vie de pêcheurs pour Pierre et de docteur de la Loi pour Paul. Ils ont eu l’audace de tout quitter, de tout remettre en cause, sans crainte, avec enthousiasme. Nous vivons dans un monde qui clame sa liberté, et qui pourtant normalise tout, de la taille, des œufs, aux repérères moraux les plus sacrés. Pierre et Paul sont des hommes libres qui osent remettre en question le monde dans lequel ils évoluent. Leur audace les lance sur les routes de l’empire romain à la rencontre de tous, sans exception. Ils annoncent que tous les hommes sont appelés à la même vie et que le Christ ne fait pas acception des personnes. Le plus éloigné devient alors un frère à aimer. Cette révolution évangélique bouleversera la société antique, comme elle doit continuer à bouleverser la société d’aujourd’hui. À leur suite, ayons l’audace de faire résonner le message de l’Évangile. Il est original, décalé, face aux certitudes passagères de nos sociétés. Si nous jouons la même musique que le monde, qu’est-ce que nous pouvons donc lui apporter ? L’audace des apôtres doit être la nôtre. Non pour créer le trouble, mais pour ouvrir des chemins de lumière aux hommes de ce temps. L’audace est un don à demander. Le chrétien pépère… c’est fini ! Le Seigneur a besoin d’apôtres audacieux.
Le troisième mot qui me paraît important pour aujourd’hui c’est l’unité. Pierre et Paul ont vécu des déchirement intérieurs douloureux, face aux refus des juifs ou des païens. Mais ils ont offert des perspectives plus grandes que l’horizon de leur petite patrie. À l’heure où nous voyons que notre monde se rétracte, les identités particulières prennent la place des opinions. La différence est pointée du doigt. Les adversaires deviennent des ennemis. Le rejet de l’autre devient un simple propos de table. Face à ce repli mortifère, regardons Pierre et Paul qui ne cessent d’affirmer que l’unité dans l’amour est le seul horizon de vie pour l’humanité, à la suite du Christ.
Lors du dernier conclave, je me demandais pourquoi tant de télévisions et de chefs d’États pour, somme toute, un évènement purement interne à l’Eglise. Et la réponse arriva aussitôt : seule l’Eglise, malgré la misère de ses péchés, ose annoncer la fraternité universelle dans le concret de toutes les sociétés, à travers tous les pays de la planète. Le message du Christ rassemble toutes les langues et tous les peuples. Nous n’avons pas à en rougir. Pierre et Paul ont été fiers d’être disciples de Jésus jusqu’au bout.
Fermeté, audace, unité. Voilà les chemins que Pierre et Paul nous invitent à emprunter dans la joie de la résurrection et la force de l’Esprit Saint.
Ici, même, au cœur des Alpes, Benoîte Rencurel a su être audacieuse pour l’Évangile face à toutes les contradictions. Elle a été ferme dans son témoignage face au doute et au dénigrement de ses adversaires. Elle a travaillé à l’unité qu’elle soit intérieure ou fraternelle en luttant par son engagement et sa prière.
À la suite de Pierre, de Paul, de Benoite, et de tant de témoins, soyons fermes, audacieux, et, par-dessus tout, artisans passionnés de l’unité dans l’Amour. Alors, nous commencerons à devenir de véritables disciples…