La liturgie de ce jour nous invite à revenir à la source. Si nous écoutons attentivement ce qui nous est dit de la part du Seigneur et par le Seigneur lui-même, nous pouvons mieux comprendre qui nous sommes et quelle est notre mission dans le monde. On entend souvent dire que la crise qui marque notre monde est liée à la perte de sens, comme si nous ne savions plus qui est l’homme, quelle est sa place dans l’univers, quel est son rôle dans la vie de la société. Alors, écoutons la voix du Seigneur, ouvrons nos oreilles et notre cœur, nous entendrons une Parole qui nous révèle le sens de notre dignité humaine et de notre vocation. Cette Parole est vérité et vie. En elle, c’est Dieu qui parle et il ne saurait ni se tromper, ni nous tromper.
La première affirmation que nous trouvons dans le livre du Deutéronome nous situe au cœur du projet de Dieu : c’est lui qui crée l’homme sur la terre, qui parle à son peuple et le conduit à la liberté. L’homme n’est pas à l’origine de lui-même. Il reçoit sa vie comme un don de Dieu. Toute sa grandeur de créature est de se réjouir et d’accepter cette relation d’origine et de collaborer librement à l’œuvre du Créateur en veillant sur la création et en lui permettant de porter du fruit. Cette vie est reçue comme un fruit de l’amour de Dieu, elle n’est donc pas manipulable selon nos caprices, pour satisfaire nos besoins ou nous compromettre avec certains lobbies. Toute vie est un don de Dieu. En elle, c’est l’amour de Dieu qui se manifeste. Ce Dieu Créateur et Père ne cesse de parler à ses enfants car il voit en chacun d’eux un partenaire en vue d’une alliance qui implique un don total de soi-même. En parlant, il révèle son dessein et il redit sa confiance en l’homme. Par sa Parole il trace un chemin et enseigne l’homme afin qu’il puisse orienter sa vie dans la fidélité à la volonté du Seigneur. Sa Parole n’est jamais pour la condamnation mais toujours pour la libération. Pour l’homme, elle n’est pas synonyme d’étouffement mais d’épanouissement de toutes ses capacités. Elle n’est pas associée à une œuvre de mort mais toujours pour la manifestation et le triomphe de la vie.
Ce Dieu qui crée et parle est aussi le Dieu qui offre à l’homme, à tout homme, la liberté. Saint Paul dira que cette liberté est la liberté des enfants de Dieu, de ceux qui sont héritiers avec le Christ. Cette liberté est aussi un don de Dieu, une ressemblance avec lui. Elle nous engage à mettre concrètement en pratique dans notre vie personnelle le cœur du message évangélique : le commandement de l’amour. Ce n’est pas la possibilité de faire ce qui nous plait dans une recherche égoïste de notre satisfaction individuelle, mais la liberté de répondre à la vocation filiale et fraternelle qui est la nôtre depuis notre baptême. La liberté de ceux qui suivent le Christ, c’est aussi la liberté de choisir la croix parce qu’alors nous choisissons également la gloire avec le Ressuscité. Dans une société où on nous parle plus de plaisir passager que de bonheur durable dans la fidélité, nous avons la liberté de suivre le Christ et de permettre ainsi à tout homme de retrouver une espérance.
Habités et poussés par l’Esprit, nous sommes missionnaires. Par notre parole et nos actes quotidiens, nous proclamons que Jésus est la Bonne Nouvelle pour l’homme. Il nous révèle le vrai visage du Père et nous apprend ce que signifie être fils dans la communion avec lui. Libérés de nos peurs, de nos craintes, de nos doutes et de nos lenteurs à croire, nous marchons jour après jour sur les chemins de nos vocations personnelles en sachant que Jésus est avec nous aujourd’hui et jusqu’à la fin du monde.
Nous ne sommes pas seuls sur la route. Notre baptême nous a définitivement insérés au cœur de la communion de vie et d’amour du Père, du Fils et de l’Esprit. Nous sommes marqués par la présence fidèle de ce Dieu Un qui se donne à nous dans la trinité des Personnes. Dire que Dieu est Un ne signifie pas qu’il est solitaire. Il est Un dans la communion de vie et d’amour du Père et du Fils, dans l’Esprit. À nous d’apprendre à manifester dans le monde cette présence du Père qui crée et sauve, du Fils qui aime et donne sa vie, de l’Esprit qui est communion et vérité. À notre mesure, nous participons à ce mystère insondable et inexplicable de la Trinité. Au sein de notre communauté familiale et ecclésiale, chacun est unique et chacun a besoin de la relation avec les autres ; chacun a sa vocation et chacun bénéficie des dons reçus par les autres ; chacun aime à sa manière et cet amour est chaque fois source d’un dynamisme nouveau pour l’ensemble.
À la suite des Apôtres qui sont envoyés dans le monde pour faire des disciples, baptiser et enseigner, notre mission est aujourd’hui encore de révéler Jésus Christ. C’est en lui que le mystère de l’homme s’éclaire vraiment, c’est lui qui manifeste pleinement l’homme à lui-même et lui découvre la sublimité de sa vocation. N’ayons ni peur ni honte de dire à nos contemporains que c’est le Dieu Trinité, Père, Fils et Saint-Esprit qui est l’avenir de l’homme et la réponse à sa quête de sens ! Comme le dit un auteur contemporain, « dans une société liquide, il nous faut professer un credo solide » ! Et, pour nous, il y aurait non-assistance à personne en danger si nous nous taisions quant à notre foi et à notre espérance, quant à notre certitude de la victoire de la vie et de l’amour. C’est l’homme vivant et debout qui est la gloire de Dieu. Quand nous proclamons notre foi, quand nous la vivons dans toutes les circonstances de notre vie quotidienne, nous rendons gloire au Père, au Fils et à l’Esprit. Telle est notre mission, telle est aussi notre joie. Amen.