Dimanche de Pentecôte

dimanche 23 mai 2021

Par le père Miguel Mekena Mekongo

Frères et Sœurs Bien-aimés, nous nous sommes rassemblés dans cette basilique avec la Vierge Marie, Notre Dame du Laus, pour faire mémoire, c’est-à-dire nous souvenir de l’événement du don l’Esprit Saint aux disciples unis et réunis, et le rendre présent pour nous. Nous voulons aujourd’hui d’un seul cœur, invoquer l’effusion de l’Esprit Saint sur nous, sur toute l’Église et sur le monde. Pour nous disposer à le recevoir, je nous propose de redécouvrir le sens profond de la solennité que nous célébrons, avant de goûter à l’action de l’Esprit-Saint telle qu’elle nous est suggérée à travers les images que nous rencontrons dans la Parole de Dieu de ce jour.

Dans l’extrait du livre des Actes des Apôtres que nous avons écouté en première lecture et qui nous a relaté les circonstances dans lesquelles l’Esprit Saint descendit sur les membres de la première communauté chrétienne, nous lisons ceci : « Quand arriva le jour de la Pentecôte, au terme des cinquante jours après Pâques, ils se trouvaient réunis tous ensemble. (…) Tous furent remplis d’Esprit Saint ». C’était donc un jour de Pentecôte, une fête juive au cours de laquelle le peuple d’Israël célébrait sa joie et sa reconnaissance au Dieu Vivant qui lui a fait don au Mont Sinaï de la Torah, un ensemble de lois inscrites sur des tablettes, des lois qui faisaient leur fierté devant les autres peuples comme nous pouvons le constater dans la déclaration de Moïse dans le livre du Deutéronome : « Vous les garderez, vous les mettrez en pratique ; ils seront votre sagesse et votre intelligence aux yeux de tous les peuples. Quand ceux-ci entendront parler de tous ces décrets, ils s’écrieront : « Il n’y a pas un peuple sage et intelligent comme cette grande nation ! » » (Dt 4, 6).

La grande question est alors : Pourquoi c’est précisément le jour où le peuple célébre le don de la Loi par Dieu que l’Esprit Saint est donné aux disciples ? Je voudrais trouver une réponse dans l’histoire de cette jeune maman. Quand elle était adolescente, elle lisait dans des livres spécialisés pour comprendre et pouvoir éprouver des sentiments d’une mère vis-à-vis de son enfant. Ces livres étaient pour elle une indication précieuse, mais externe et n’arrivait pas vraiment à les intérioriser. Et un jour, elle est devenue maman ; Et c’est de l’intérieur cette fois que lui sont venus ces sentiments de mère : elle se levait un nombre incalculable de fois dans la nuit pour apporter ses soins à son enfant sans même s’en rendre vraiment compte. Voilà pourquoi l’Esprit nous est donné un jour de Pentecôte, pour donner de réaliser qu’Il est la Loi nouvelle, celle qui n’est pas inscrite sur des tablettes en pierre, mais dans nos cœurs.

Oui, nous éprouvons une certaine difficulté à nous conformer aux lois qui nous sont extérieures, c’est alors de l’intérieur que Dieu veut nous guider par une Loi jamais écrite jusque-là. Quelle loi peut nous dire d’être disposé à donner notre vie pour une personne qui nous fait du mal ? La Torah, non ! Les lois de notre république, non ! Seul l’Esprit de Jésus peut nous l’inspirer, l’Esprit Saint de qui nous recevons du Ciel une nature nouvelle, une vie nouvelle. Cet Esprit le Christ nous fait, Il l’appelle le Défenseur : « Quand viendra le Défenseur, que je vous enverrai d’auprès du Père, (…) il rendra témoignage en ma faveur ».

L’Esprit Saint est le Défenseur, le Paraclet, l’Avocat, celui qui défend et protège. Mais de quoi nous protège-t-Il ? Une des épreuves les plus difficiles pour le chrétien aujourd’hui est de se sentir tout seul au milieu de personnes qui raisonnent et agissent selon des critères bien différents de ceux de l’Évangile et qui produisent ce que Saint Paul, dans la deuxième lecture de ce jour, qualifie d’œuvres de la chair : « inconduite, impureté, débauche, idolâtrie, sorcellerie, haines, rivalité, jalousie, emportements, intrigues, divisions, sectarisme, envie, beuveries, orgies et autres choses du même genre ». L’Esprit est alors en nous pour nous défendre et nous protéger contre cette logique du monde qui est considérée par tous comme sagesse : « Jouis de la vie, fais ce qui te plait ». L’Esprit vient nous souffler que : « Fie-toi à Jésus, c’est lui a raison ; pratique la douceur, la chasteté, la patience, la maitrise de soi, le renoncement, le pardon, la bonté ».

A côté de cette image de Défenseur, dans son récit de Pentecôte, la Parole de Dieu de ce jour emploient plusieurs autres images pour désigner l'Esprit Saint ; je voudrais m’attarder sur deux parmi elles pour vraiment nous inviter à à Le laisser agir en nous : le Vent et le Feu. « Soudain un bruit survint du ciel comme un violent coup de vent : la maison où ils étaient assis en fut remplie tout entière ». Le Saint Esprit est le souffle de ce vent dont la puissance purifie l’atmosphère spirituel de notre société polluée, intoxiquée par les images relayées par les médias qui transforment en spectacle le plaisir, la violence, les actes de mépris envers les femmes et les hommes, envers leur vie, envers leur mariage. En dissipant ce qui étouffe et empoisonne le cœur et l’esprit, L’Esprit qui planait sur les eaux au Commencement nous fournit un air sain, précieux pour notre vie spirituelle, et Il communique un Souffle qui redonne force et vigueur aux personnes et aux réalités essoufflées : Aux mariages, aux amitiés et aux familles essoufflés par les trahisons et les conflits ; aux vies individuelles et aux volontés essoufflées par les épreuves et les échecs, aux communautés ecclésiales essoufflées par les scandales et les attaques du démon.

En évoquant la dernière image, celle du feu, j’ai juste envie de chanter « Alléluia ! », car ce feu est aujourd’hui allumé. Comme la première communauté chrétienne réunie autour de la Vierge Marie, nous sommes tous témoins de l’accomplissement des promesses de notre Seigneur. Rappelons ces paroles de Jésus rapportées par Saint Luc : « Je suis venu apporter un feu sur la terre, et comme je voudrais qu’il soit déjà allumé ! » (Lc 12, 49). Aujourd’hui, ici et maintenant, le Christ allume même un incendie, et sa flamme embrase tous ses disciples.

« Alors, leur apparurent des langues qu’on aurait dites de feu, qui se partageaient, et il s’en posa une sur chacun d’eux. Tous furent remplis d’Esprit Saint ». Le feu de Dieu, le feu de l'Esprit Saint, le feu du Buisson ardent descend à cet instant. Ne Lui résistons pas, Il embrase mais ne consume ni ne détruit ce qu’il y a de meilleur en nous : Notre foi, notre joie, notre liberté, notre amour, nos vertus étincellent sous sa lumière ; mais nos vices sont détruits par lui. N’ayons pas peur de prendre feu par crainte de devoir renoncer à quelque-chose de beau : une part de nous-même, une relation, une amitié, un loisir, situation socio-professionnelle ou certaines expériences. N’en soyons pas effrayés, car le meilleur restera et resplendira.

Loué soit Jésus-Christ !