Fête de ND du Laus - Rassemblement synodal diocésain

dimanche 01 mai 2022

Par Mgr Xavier Malle, évêque de Gap et Embrun

« Le sanctuaire de Dieu, qui est dans le Ciel, s'ouvrit, et l'Arche de son Alliance apparut dans le sanctuaire"

Dimanche dernier, fête de la Divine Miséricorde, nous célébrions Dieu riche en miséricorde, qui s’était montré à Ste Faustine, sous les traits de Jésus avec son coeur ouvert et l’inscription « Jésus j’ai confiance en toi ». Ce troisième dimanche du temps pascal, dans le diocèse de Gap, nous célébrons la fête de ND du Laus, le 1er jour du mois de Marie, le mois de Mai, période des premières apparitions au Laus en 1664.

Saint Jean, l’auteur du livre de l’Apocalypse, nous en donne le sens avec cette image grandiose : « Le sanctuaire de Dieu, qui est dans le ciel, s’ouvrit, et l’arche de son Alliance apparut dans le Sanctuaire. » C’est cela qui se passe dans un lieu d’apparition de Marie ! C’est cela qui s’est passé dans ce lieu que Marie a demandé à son Fils comme refuge des pécheurs ! Et pourquoi ? Comme un rappel de l’Alliance. Ce petit mot « l’Alliance » peut résumer à lui tout seul la Bible. Dieu ne s’est jamais résolu à la rupture des hommes avec lui et veut amener les hommes à une vie de communion avec Lui. On pense bien sur à l’arche de Noé et son arc en Ciel, prémisse de l’Alliance avec le peuple hébreu. Dès le buisson ardent, le Seigneur révèle à Moïse et à son peuple son projet d’amour : Israël sera son peuple et le Seigneur son Dieu ; Il  lui donnera la terre promise. Pendant tout l’Exode, Dieu se montra son protecteur. Puis il lui donne en quelque sorte les clauses de l’Alliance, les 10 commandements. Cette Alliance sera renouvelée à plusieurs reprise, avec le roi David et ses successeurs, puis avec les prophètes, qui tourneront le peuple vers l’attente du Messie pour une nouvelle Alliance. Ce sera l’incarnation de Jésus, fils de Dieu, et toute sa vie, jusque sa résurrection, à travers sa passion. A la dernière Cène, Marc rapporte que Jésus prenant le vin déclare : « Ceci est mon sang, le sang de l’Alliance qui va être répandu pour une multitude ». Aux sacrifices d’animaux de la première alliance du Sinaï, se substitue un sacrifice nouveau dont le sang réalise une union définitive entre Dieu et les hommes. Et cet acte sera rendu présent dans le geste rituel que Jésus ordonne de refaire « en mémoire de Lui ». C’est par notre participation eucharistique que nous sommes unis au mystère de l’Alliance nouvelle.

On comprend alors que la tradition de l’Eglise ait comparé la Vierge Marie, mère de Jésus, à l’Arche d’Alliance, celle qui contenait les paroles de l’Alliance. Jésus est bien le Verbe, parole d’amour du Père pour chacun de nous, en offrant sa vie en sacrifice pour nous. « Le sanctuaire de Dieu, qui est dans le ciel, s’ouvrit, et l’arche de son Alliance apparut dans le Sanctuaire. »

Saint Jean développe ensuite sa vision impressionnante : « Un grand signe apparut dans le ciel : une Femme, ayant le soleil pour manteau, la lune sous les pieds, et sur la tête une couronne de douze étoiles. » Elle est enceinte, mais le dragon, l’ennemi antique, cherche à dévorer l’enfant, c’est le combat spirituel qui se continue en chacun de nous, si bien décrit par St Paul notre seconde lecture : notre conduite est trop souvent « soumise aux forces mauvaises de ce monde, au prince du mal qui s’interpose entre le ciel et nous ». Mais poursuit St Paul : « par la grâce vous êtes sauvés, et par le moyen de la foi. Cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu. » Effectivement la vision de St Jean se conclue par la victoire annonçant la résurrection de Jésus : « Maintenant voici le salut, la puissance et le règne de notre Dieu, voici le pouvoir de son Christ ! »

Nous venons de parcourir le plan divin du salut, le moyen par lequel Dieu a fait alliance avec nous. Première Alliance avec un peuple particulier, pour en faire un peuple au service de l’humanité entière et dans lequel il fait naître son fils Jésus, alliance en son être même entre Dieu et l’humanité, alliance dont nous sommes bénéficiaires en étant plongé dans la mort et la Résurrection de Jésus à notre baptême et à laquelle nous sommes unis par l’Eucharistie. 

VOYEZ ALORS LA PLACE CRUCIALE DE MARIE, ARCHE DE L’ALLIANCE, QUI A PORTÉ LE SALUT DU MONDE.

Dans l’évangile de la Visitation, à travers la rencontre de Marie et de sa vieille cousine Elisabeth, c’est Dieu qui se rend proche de l’humanité. On pourrait dire que la vieille Elisabeth, c’est vous et moi ! Avec nos vieilleries, avec nos péchés ! Et ici au Laus particulièrement, Jésus vient à nous dans le sein de Marie. Alors la foi profonde que nous avons reçu au baptême exulte de joie et d’étonnement : « D’où m’est-il donné que la mère de mon Seigneur vienne jusqu’à moi ? …

Charles de Foucauld, que notre pape François va canoniser le 15 mai prochain s’est aussi comparé à Elisabeth, considérant qu’il avait été visité par une autre Marie, sa cousine Marie de Bondy : « Que Vous êtes bon, mon Dieu ! […] Par la Visitation Vous allez sanctifier St Jean et Sa famille… […] C’est Vous qui allez à Jean ; […] c’est vrai pour tous les hommes, pour St Jean, le plus grand d’entre eux, et pour moi, le dernier des pécheurs. Oh ! mon Dieu, que Vous êtes bon ! Que Vous m’avez cherché ! Combien c’est Vous qui m’avez cherché, choisi et non moi qui Vous ai choisi et cherché ! […] Vous êtes venu, porté par une autre Marie, […] et Vous m’avez sanctifié sans que j’y fusse pour rien, faisant tout pour moi, Vous seul, avec l’aide de celle qui Vous portait… » (MSE – M/261 : dans NC La Bonté de Dieu p. 211)

Le mystère de la Visitation devient l’idéal de vie de Charles  ! Il l’écrit à l’abbé Huvelin, depuis Jérusalem, le 2 janvier 1899 : « Il y a environ cinq ans et demi que je vous ai dit… que mon idéal était d’imiter la sainte Vierge dans le mystère de la Visitation en portant, comme elle, en silence, JESUS et la pratique des vertus évangéliques, non chez sainte Elisabeth, mais parmi les peuples infidèles, afin de sanctifier ces infortunés enfants de Dieu par la présence de la sainte Eucharistie et l’exemple des vertus chrétiennes… » (Dans NC Charles de Foucauld Abbé Huvelin p. 163)

Cette après-midi, aux Vêpres, j’enverrai en pèlerinage par une bénédiction spéciale des Haut-alpins qui partent bientôt à Rome pour la canonisation de frère Charles, membres de la Fraternité Charles de Foucauld et militaires du 4ème chasseur emmenés par leur colonel ; frère Charles ayant été militaire.

Cet idéal de la Visitation, cet idéal de frère Charles, porter Jésus, c’est devenir ce que le Pape François appelle un disciple missionnaire. C’est tout l’enjeu de la vision pastorale diocésaine que je vous présenterai cette après-midi, avec ses 5 chantiers missionnaires. Comment porter Jésus aux habitants des Hautes-Alpes dans les années à venir ? C’est aussi tout l’enjeu du Synode sur la synodalité auquel le pape nous a convoqué. Loin d’être une église « auto-centrée » qui se regarde elle-même et en reste aux questions de structure, le défi est une conversion missionnaire, comme l’indique le sous-titre du synode : Communion, participation et mission. La synodalité (syn-odos en grec, ensemble cheminer) « désigne le mode de vie et d’action spécifique de l’Église – Peuple de Dieu qui manifeste et réalise concrètement sa communion en cheminant ensemble, en se rassemblant en assemblée et par la participationactive de tous ses membres à sa missionévangélisatrice ». (CTI 2018, La synodalité dans la vie et dans la mission de l’Eglise) 

Le pape insiste : le but de ce synode n’est pas de produire des documents, mais de vivre une expérience de communion, de participation et de mission, pour « faire germer des rêves, susciter des prophéties et des visions, faire fleurir des espérances …»Alors cette après-midi, nous partagerons quelques fruits du travail de la cinquantaine de petits groupes synodaux, et j’inviterai ces groupes et tous ceux qui veulent se mettre en chemin, à s’approprier la vision pastorale et à travailler les chantiers missionnaires. Comme le dite la prière de cette messe : « Dieu dont la miséricorde est sans mesure, tu nous as donné la bienheureuse Vierge Marie comme refuge des pécheurs ; accorde-nous, à nous qui faisons mémoire de Notre Dame du Laus, de goûter ici-bas la douceur de ta bonté et de suivre ton Fils par une vie de plus en plus fidèle » et j’ajoute avec notre pape, « en disciple missionnaire ». Amen.