3ème dimanche de Carême

dimanche 03 mars 2024

Par le père Michel Desplanches, recteur

Lorsque notre entourage nous reproche une réaction vive ou violente, nous avons vite recours au passage des Évangiles que nous venons d’entendre : « Jésus a bien chassé les marchands du Temple !». Comme si l’Évangile était une chronique des humeurs du Christ ! Soyons sérieux. Tout dans la vie du Christ est révélation de l’amour du Père. Aussi, notre lecture suppose-t-elle de se renseigner un peu sur ce dont il s’agit. Le Temple de Jérusalem est splendide. Les juifs de tout le bassin méditerranéen s’y pressent. Ils n’ont qu’un seul Temple, celui de Jérusalem! Ce temple est «l’escabeau des pieds de Dieu » dit l’Écriture. Seuls les prêtres peuvent entrer dans cet édifice. Avant d’entrer dans le parvis du Temple, les juifs qui désirent offrir un sacrifice doivent se procurer des animaux. Le culte juif est un culte sacrificiel. Les marchands d’animaux sont donc nécessaires au x pèlerins venus de loin. Mais, pour régler leurs  achats, aucun argent païen, et donc impur, ne peut pénétrer dans la zone du temple. Chaque pèlerin doit pouvoir changer son argent contre une monnaie spéciale battue par l’administration religieuse du Temple. Nous voyons donc là combien ces métiers sont essentiels au bon fonctionnement du service sacerdotal. Les prêtres offrent des sacrifices à longueur de journée. Pour obtenir le pardon de Dieu, il faut faire un sacrifice. Le lien avec Dieu est donc entretenu par les changeurs et les marchands d’animaux. En s’attaquant à ces métiers, Jésus vient remettre en cause tout cet édifice religieux, ce culte basé sur la multiplication des sacrifices en un seul lieu consacré.

Ce système religieux est dévoyé aux yeux du Christ. Jésus va le révéler en chassant les marchands et les changeur. Il va le faire à la manière des prophètes qui, au long de la Bible, posent des actes spectaculaires, surprenant, énigmatiques parfois. Des gestes  qui réclament  une explication. En effet, changer la Loi de Moïse, Dieu seul peut le faire !

On demande donc à Jésus un signe. Mais Jésus est lassé de donner des signes de sa divinité qui ne sont jamais accueillis: « Détruisez ce Temple et en trois jours je le relèverai ». Et saint Jean précise : « Aussi quand il se réveilla d’entre les morts, ses disciples se rappelèrent qu’il avait dit cela ». Ce n’est donc qu’après Pâques que le Temple nouveau sera édifié, rendant le Temple de Jérusalem inutile et sans valeur.

Par la scène des marchands chassés du temple, Jésus préfigure donc une nouvelle manière de rendre un culte à Dieu. Le Temple nouveau, c’est son corps, mort est ressuscité, auquel est intégré le peuple des baptisés vivant de l’Esprit Saint. Et ce sanctuaire non fait de main d’homme est éternel, lui.

Par son unique sacrifice Jésus offre désormais un libre accès au Père, où que l’on soit et quelles que soient les circonstances. La résurrection inaugurera un monde radicalement nouveau car Jésus a parfaitement accompli la Loi pour l’amour de Dieu et pour l’amour de ses frères les hommes. Il est, en lui-même, la perfection de la Loi. Il est l’Amour même de Dieu qui sera sacrifié et vainqueur de la mort. Ainsi Jésus purifie la relation à Dieu de tous ces sacrifices indéfiniment répétés. Il est l’Agneau immolé, le seul à pouvoir mettre fin à l’œuvre du Mal et de la Mort.

Ainsi pour devenir ce que nous sommes déjà, un temple saint où Dieu demeure, chassons impitoyablement les mensonges, les doutes, la perversité, l’hypocrisie, la soif de pouvoir… C’est une nouvelle relation à Dieu qui doit s’instaurer désormais dans une vérité totale et dans une limpide sincérité. Durant ce carême, notre maison intérieure nécessite sûrement un peu de ménage car c’est Dieu lui-même qui veut y demeurer.

 

Père Michel Desplanches

Recteur