Homélie du 24ème dimanche du temps ordinaire

dimanche 15 septembre 2024

Par le père Michel Desplanches, recteur

À l’écoute de cette page d’Evangile, il peut nous apparaître que Jésus ne sait vraiment  pas mettre en valeur sa mission!  Alors que Pierre proclame avec enthousiasme qu’il  est le messie, Celui pour lequel il a tout quitté, Jésus vient briser le joyeux élan de son compagnon. Quelle drôle de façon de réagir!

 Nous nous voyons bien là que Jésus ne cherche pas à fonder une institution humaine, destinée à la gloire et au pouvoir. Si c’était le cas, il n’aurait jamais annoncé la Passion ! Il aurait promis la réussite, le rendement, et les compromissions qui vont avec!

Pourtant, si nous admirons la foi de Pierre, nous avons pris l’habitude, de lui reprocher de n’avoir rien compris… Aurions-nous eu un avis plus éclairé que celui de Pierre ? Ça reste à prouver… Dans notre société et notre Eglise tiraillées  de toute part, les critiques ne manquent pas. Chacun a sa solution pour que tout aille mieux.: « Il suffirait que l’évêque fasse ceci, ou que le pape décide cela ! ». Ou encore : « le premier ministre devrait faire ceci, le président devrait décider cela ! ».

Chacun s’enferme dans sa bulle, dans son système de valeur, dans sa vision personnelle des événements.

Mais, écoutons-nous Jésus ? Qu’est-ce que la réussite pour Jésus ? Quel Messie suivons-nous ? Car c’est de lui avant tout que nous vient la lumière, il ne faut pas l’oublier!

Nous sentons bien qu’un regard purement humain sur l’Eglise ou sur le monde ne suffit pas. La réussite et la gloriole  sont les armes de Satan, nous  dit Jésus. Rien de moins. La réussite. selon Dieu, c’est autre chose. Et cela réclame un regard surnaturel, c’est-à-dire un regard qui se porte au-delà des perspectives humaines. Ce ne sont pas nos stratégies qui mèneront le monde vers le salut . Tout cela est poussière et illusion. Jésus ne vient pas réussir en établissant une stratégie. Il vient pour sauver le monde de la mort et du mal. Et pour cela, il se livre, il offre sa vie par amour pour nous, pour nous donner de partager sa vie divine éternellement en brisant le rempart de la mort.

Vous connaissez sans doute l’histoire du dialogue entre Napoléon et le cardinal Consalvi alors qu’il s’agissait de rédiger un concordat entre l’Eglise et l’État. Agacé par une Eglise qui voulait garder une certaine indépendance face au pouvoir, Napoléon s’écria : « Je vous détruirai! » . Le cardinal lui répondit : « Depuis 1800 ans nous autres avons essayé de le faire, et nous n’y sommes pas parvenus » !

La vie de l’Eglise, la sainteté de l’Eglise, l’énergie qui la porte ne sont pas notre œuvre. Et notre péché, si noir soit-il, ne l’empêchera jamais d’être le Corps du Christ, continué dans le temps et l’espace. Car « Le Christ et l’Eglise c’est tout un! », comme le disait sainte Jeanne d’Arc à ses juges.

Bien sûr, Pierre n’a pas encore pénétré la profondeur de ce mystère. Les sentiers de la gloire sont, pour lui,  parsemés d’honneur et de respectabilité.

Mais, baptisés, nous ne sommes pas les disciples d’un grand diplomate ou d’un Golden Boy. L’œuvre du Christ n’est pas humaine. Il ne s’agit pas pour lui, de séduire une clientèle. Le Christ est venu dans le monde pour accomplir la volonté du Père. Et, pour Lui, la Vérité et la Vie passent par la croix.  C’est ce que la fête d’hier nous a rappelé. La gloire de Dieu passe par l’offrande totale, par l’humiliation et par la mort. Rien de médiatiquement vendable… Sauver sa vie par des moyens humains, c’est donc la perdre. Mais perdre sa vie à la suite de Jésus, c’est la sauver.

Ce mystère de la volonté de Dieu est  pleinement accompli en Marie, qui a perdu sa vie aux yeux du monde et qui, dans cette offrande d’elle-même, a trouvé le chemin de la gloire. Avec Marie au pied de la croix, trouvons la vie et partageons la gloire que le monde ne comprendra jamais. En donnant tout, nous recevrons tout…

Père Michel Desplanches

Recteur