11e dimanche du temps ordinaire

dimanche 13 juin 2021

Par le père Brice-Miguel Mekena Mekongo, vice-recteur

« Tu ne te corrigeras jamais », « tu ne changeras jamais de comportement », voilà Frères et sœurs bien-aimés, des paroles qui trahissent souvent nos pertes de motivation dans certaines missions que nous avons reçues du Seigneur. Aujourd’hui, le message de Jésus est pour ceux qui annoncent l’évangile : les prêtres, les catéchistes, les parents qui veulent transmettre au peuple de Dieu, ou à leurs enfants la foi par l’éducation et le témoignage de vie ; ce message est pour tous les fidèles chrétiens qui se réfèrent à l’évangile pour présenter leur choix de vie, ou pour se prononcer sur des réalités politiques, sociales ou économiques.

Il n’est pas rare en effet, de lire de la souffrance et du découragement sur le visage et dans le discours des forces vives de l’Église que nous sommes face à certaines situations : Des édifices religieux abandonnés, fermés, vendus, transformés en boîte de nuit, en musée, en mosquées, (nous nous rappelons de ce qu’est devenue la célèbre basilique Sainte Sophie en Turquie). Ces réalités et d’autres comme l’abandon de la pratique religieuse et la prolifération des propositions de vie antiévangéliques qui séduisent les jeunes aujourd’hui et dans lesquelles l’homme et la Société ne peuvent plus être compris sans la référence à l’argent, aux plaisirs, aux divertissements et aux distractions, font mal à tous ceux qui sont réellement attachés au Christ et à la mission de son Église. Pourquoi continuer à parler de l’Évangile à ceux qui ne sont pas intéressés ou qui sont intéressés par tout autre chose ? Les fidèles du Christ, laïcs, époux chrétiens, religieux, religieuses, prêtres ne doivent-il pas simplement se résoudre à disparaître ?

Si nous sommes dans cet état d’esprit aujourd’hui, Jésus a quelque-chose à nous dire dans l’Évangile de ce jour. Il répond à nos interrogations profondes par une parabole qui met en scène un agriculteur.

« Il en est du règne de Dieu comme d’un homme qui jette en terre la semence : nuit et jour, qu’il dorme ou qu’il se lève, la semence germe et grandit, il ne sait comment ». Jésus explique ici ce qu’est le Règne de Dieu. Nous le savons, par sa personne et son message, il est venu inaugurer dans ce monde, le Règne de Dieu, c’est-à-dire une société alternative et réellement humaine qui évidemment se réalisera pleinement auprès du Père Éternel. Ce Règne de Dieu est semblable à un homme qui jette la semence, c’est-à-dire la balance à pleine main de manière abondante à divers endroits sur le terrain ; où elle tombe, elle tombe !

Il faut dire que l’action de cet agriculteur est un véritable acte de foi et d’espérance. Foi en la force de vie de la semence qui résiste aux difficultés et qui à la fin, germe. Foi en ces terrains qui pourront donner des fruits. Comme la semence que l’on jette, ainsi doit être annoncé le message évangélique, pas à des personnes en particulier (par exemple ceux qui en seront ouverts), mais à tous les hommes, aux plus accueillants comme aux plus hostiles. Mais c’est avant tout un acte de foi. L’évangélisation et l’éducation chrétienne sont d’abord un acte de foi pour le catéchiste, le parent, le missionnaire, le prédicateur. Acte de foi en la force de la Parole annoncée ou vécue capable de produire des fruits extraordinaires, de changer le cœur des personnes, de créer un monde nouveau. Et acte de foi aussi en l’homme qui est fait pour accueillir cette Parole.

A nous fidèles de Dieu qui vivons au rythme vertigineux de notre société, une société de production et de consommation, Attention à l’erreur ! Celle de prétendre voir immédiatement le résultat. Attention pour le prêtre qui après avoir semé cette Parole, s’attend à voir immédiatement toutes ces personnes rejeter ces raisonnements du monde qui soutiennent et défendent des contre-valeurs. Attention aux chrétiens qui attendent rapidement la conversion de leurs enfants, amis et conjoints après leurs excellents conseils éclairés par l’Évangile. Dans l’évangile, contemplons l’inactivité de l’Agriculteur pendant que la semence se développe : « nuit et jour, qu’il dorme ou qu’il se lève, la semence germe et grandit, il ne sait comment ».

Le message évangélique requiert du temps pour être assimilé et porté du fruit. Patience et espérance ! Patience pour son époux ou son épouse, pour son enfant ou son parent, pour son ami ou son ennemi qui n’a pas encore changé. Espérance en la semence évangélique qui a sa vitalité propre et qui portera du fruit en son temps. Fions-nous à la graine évangélique qui est vivante, qui est Parole de Vie et qui agit dans le silence du cœur.

« À quoi allons-nous comparer le règne de Dieu ? Par quelle parabole pouvons-nous le représenter ? s’interroge Jésus. Il est comme une graine de moutarde ». Saint Jean-Chrysostome nous dit que cette graine du Règne de Dieu c’est le Christ Lui-même. Et c’est le Père qui l’a planté comme nous l’apprenons par la bouche du prophète Ézéchiel dans la première lecture de jour : « Ainsi parle le Seigneur Dieu : « À la cime du grand cèdre, je prendrai une tige ; au sommet de sa ramure, j’en cueillerai une toute jeune, et je la planterai moi-même sur une montagne très élevée ». Il est le grain suspendu à la croix par lequel les ténèbres ont été dispersées et le monde renouvelé. A la suite du Christ, nous sommes des graines de Dieu en vue du Royaume qu’Il plante Lui-même dans une terre choisie par Lui, dans le terreau de nos existences, de nos contextes de vie : familial, affectif, professionnel, social, culturel ou géographique.

Et comme toute graine qui a besoin d’eau et de lumière pour germer, nous aussi, graines du Royaume de Dieu, en avons besoins pour germer, grandir, produire du fruit et devenir un cèdre magnifique dont les branches recouvriront la terre. Oui, nous avons besoin que l’Eau sortie du côté ouvert du Christ arrose nos vies et nos relations de la Miséricorde divine. Cette Eau, ce sont les sacrements de l’Église : Laissons-nous particulièrement arroser aujourd’hui dans les sacrements de réconciliation et de l’onction des malades que le sanctuaire propose cette après-midi.

Nous avons aussi besoin d’être réchauffés à la chaleur du feu de l’Esprit saint, à celle de la Parole de Dieu et à celle des doux rayons lumineux du Saint-Sacrement. Ainsi arrosés et réchauffés, nous ne pouvons que devenir ce que Dieu a prévu dans son projet d’amour.

Seigneur, il y a ici présentement de magnifiques cèdres, de belles jeunes pousses, des graines nouvellement semées, mais aussi graines qui tardent à germer, arrose-nous de ta Miséricorde et réchauffe-nous de ta présence pour que nous portions enfin les fruits que tu attends. Nous te le demandons par l’intercession de ta Mère, Notre Dame du Laus, Refuge des pécheurs. Amen !

Loué soit Jésus-Christ !