Solennité de la Toussaint

lundi 01 novembre 2021

Par le père Brice-Miguel Mekena Mekongo, vice-recteur

« Ces gens vêtus de robes blanches, qui sont-ils, et d’où viennent-ils ? »

Frères et sœurs bien-aimés, dans la première lecture tirée du livre de l’Apocalypse, nous avons entendu un Ancien faire cette demande à Jean dans la vision qu’il a eue et qu’il nous décrit. Cette question nous est posée aussi aujourd’hui où nous célébrons la solennité de tous les saints : ces saints pour lesquels nous nous réjouissons en ce jour, d’après vous, qui sont-ils ?

Pour être proclamé saint, il faut être mort et être paradis. Mais avant il faut avoir pratiqué de manière héroïque la vertu chrétienne et ensuite accomplir des miracles. Les saints que nous célébrons aujourd’hui seraient-ils alors des espèces de super-héros de la foi chrétienne ? Laissons la Parole de Dieu de ce jour nous donner leur identité.

Dans l’extrait du livre de l’Apocalypse que nous venons d’écouter, Jean voit deux groupes de personnes. Il voit un premier de 144 000 personnes pour lesquelles l’ange qui vient de l’Orient, du côté d’où vient la lumière déclare à quatre autres : « Ne faites pas de mal à la terre, ni à la mer, ni aux arbres, avant que nous ayons marqué du sceau le front des serviteurs de notre Dieu ». Ce sceau dont ils doivent être marqués au front est le signe d’une appartenance. Celui qui le porte appartient à Dieu.

Et ils sont 144 000 à être marqués. Nous le savons, ce chiffre n’est pas quantitatif, mais qualitatif. Il désigne les 12 tribus d’Israël multipliées par 12 et augmentées à l’infini, c’est-à-dire par 1000. Il  représente la totalité d’Israël resté fidèle à Dieu que Paul appelle l’Israël de Dieu. Cet Israël constituent tous ceux qui ont préparé la venue du Royaume de Dieu en Jésus Christ : les patriarches, les prophètes, les prêtres jusqu’à Jean le Baptiste. Cet Israël est aussi constitué de ces personnes de toutes cultures et religions qui n’ont pas connu le Christ, mais qui ont travaillé à son projet, à son avènement. Ce sont ces saintes personnes qui à travers la loi naturelle inscrite par Dieu dans leur cœur, sans véritablement connaître le Christ, sans avoir reçu le baptême, ont collaboré au projet de Dieu pour le monde. Saint Jean les voit recevoir la marque du Christ, le signe de leur appartenance à celui qu’ils ont servi sans le connaître.

Toujours dans le texte de la 1ère lecture, Saint Jean voit un 2ème groupe : « Après cela, j’ai vu : et voici une foule immense, que nul ne pouvait dénombrer, une foule de toutes nations, tribus, peuples et langues ». Et il décrit les personnes qui constituent cette foule immense. Elles sont debout, c’est-à-dire qu’elles adoptent l’attitude du Ressuscité ; elles portent un vêtement blanc, elles ont revêtu le Christ comme le dit Saint Paul aux Galates : « Vous tous que le baptême a uni au Christ, vous avez revêtu le Christ » (Ga 3, 27) ; elles tiennent à la main une palme, signe de la victoire de la Vie ; et elles louent le Seigneur.

Nous reconnaissons en effet dans cette description non seulement les saints de nos calendriers et de notre sanctoral, mais aussi tous ces saints ignorés ou oubliés qui ont été incorporés au Christ par le baptême et qui l’ont suivi dans la vie et la mort : ils étaient des époux chrétiens, membres chrétiens de nos familles ; ils étaient nos amis et nos collègues chrétiens ; ils étaient religieux, religieuses, consacrés. Mais permettez moi aussi de reconnaître dans cette description, tous les baptisés d’aujourd’hui dont nous qui sommes là faisons partie. Au tout début de l’histoire du christianisme, les chrétiens s’appelaient mutuellement les saints. Saint Paul utilise d’ailleurs ce terme pour désigner les membres des communautés à qui il adresse ses lettres : aux saints qui sont à Corinthe, Éphèse, Philippes etc. Il n’écrivait pas aux saints du Ciel, mais à des personnes concrètes qui vivent dans le monde, non plus sur la base des critères païens, mais des béatitudes.

En fait, ces saints n’attendent pas de ce monde les critères de leur bonheur, des critères qui sont : Heureux celui qui amasse des biens, qui a une belle voiture, une belle maison, qui a toujours raison, qui doit toujours être applaudi, qui satisfait tous ses plaisirs, qui est rusé, etc. Saint Jean nous dit d’ailleurs dans la 2ème lecture de jour que le monde ne connaît pas les saints, parce qu’il ne connaît pas Dieu. Non, les saints ne tirent pas du monde les critères de leur félicité, mais de la vie même de Jésus qui a parfaitement incarné les béatitudes : heureux les pauvres de cœur, les doux, les miséricordieux, les patients, les cœurs purs, les artisans de paix, qui ont faim et soif de la justice. Nous célébrons donc aussi aujourd’hui la fête de tous les chrétiens, de tous les saints.

« Ces gens vêtus de robes blanches, qui sont-ils (…) ? (…) Ceux-là viennent de la grande épreuve ; ils ont lavé leurs robes, ils les ont blanchies par le sang de l’Agneau ».

Bien-aimés du Seigneur, c’est dans le sang de l’Agneau que chaque saint blanchit son vêtement. Le sang de l’Agneau dont parle l’Apocalypse, nous le reconnaissons dans le calice de l’eucharistie où nous faisons mémoire du Sang du Christ versé par amour sur la croix et offert à chacun de nous pour notre salut. A chaque eucharistie, nous entendons ces paroles de la 2ème lecture du jour : « voyez quel grand amour nous a donné le Père ». A chaque eucharistie nous avons la grâce de blanchir notre vêtement dans le Sang de l’Agneau en consentant à nous unir au Sacrifice d’Amour du Christ. Jean nous a vus, il vous a vus qui quotidiennement ou hebdomadairement fréquentez le Saint Sacrifice de l’autel. Heureux êtes-vous ! Bonne fête à vous !

Poursuivons notre célébration en rendant grâce à Dieu pour cette communion qu’il a rendu possible et que nous fêtons dans cette solennité : la communion des saints, ceux du Ciel et ceux de la terre, car nous formons l’unique Église du Christ.

Loué soit Jésus-Christ !