Lorsque, comme vous, je fais mes courses, à la caisse la gentille dame m’avertit que je peux gagner des points pour avoir une remise. « Plus on aura de points, plus on aura de remise » me dit-elle.
Et voilà que, avec mon caddie, j’ai droit à des centaines de points !
Quel joie ! « Quelle sera donc ma réduction avec tous ces points ? ». La dame me répond : 0,63 € ! J’ai rapidement abandonné ma carte à points……Pourtant, ce système de points, nous l’avons tous dans notre tête, même dans notre démarche de foi. Obscurément, nous pensons que plus il y aura de prière, de bénévolat, de confessions, plus je serai récompensé par le Seigneur. Pourtant, la démarche de foi est plus compliquée que cela. L’investissement qu’elle requiert est aussi beaucoup plus subtil. C’est cela le sens de l’Évangile que nous venons d’entendre.
Ce n’est pas parce que je suis en prière toute la journée que ma prière est automatiquement exaucée. Ce n’est pas parce que j’ai mis un gros billet dans le tronc que je suis subitement devenu plus généreux. Ce n’est pas parce que je suis prêtre depuis 40 ans, que je suis plus saint que les autres… La foi ne se mesure pas avec des centimètres. Elle ne se pèse pas en kilos ou en années de dévouement. Il n’y a pas d’instrument de mesure de la foi. C’est bien ce qui devrait nous empêcher de nous croire meilleurs que les autres!
J’ai constaté qu’il existe aujourd’hui une espèce de mode qui consiste à accuser nos évêques de tous les maux. On est en colère, on estime avoir raison, et on se place joyeusement au-dessus de ceux que le Seigneur lui-même nous a envoyés comme pasteurs. Redevenons, chrétiens! Délicats dans notre charité, et prudents dans nos paroles, parce que cette attitude stérilise notre démarche de foi et nous ferme à l’accueil de la grâce en nous livrant au démon, ni plus ni moins.
Les apôtres, dans le texte, demandent à Jésus de faire grandir leur foi. La réponse de Jésus sera surprenante: « Si vous aviez de la foi, gros comme une graine de moutarde, vous auriez dit à l’arbre que voici : « Déracine-toi et va te planter dans la mer », et il vous aurait obéi. Ce n’est donc pas la quantité qui compte, mais la qualité de notre foi, la délicatesse de notre charité et le dynamisme de notre espérance. La graine de moutarde est minuscule presque invisible. Mais elle contient en elle une puissance surprenante. Ainsi, ce ne sont pas ceux qui parlent fort et se font remarquer qui sont les plus efficaces.
Jésus aime mettre en valeur la petitesse, la faiblesse, la fragilité. C’est ce qu’il fait en ce lieu en choisissant Benoite pour être une missionnaire ardente de la miséricorde. Benoîte, comme la graine de moutarde, était invisible et ne comptait pour personne. Mais la puissance de son témoignage n’a cessé de se répandre depuis près de quatre siècles. La puissance de la graine de moutarde est inattendue. Ce petit grain de rien du tout, ne devrait pas avoir de goût. Il est invisible. Oui, notre foi est petite, sans relief. Il n’y a vraiment pas de quoi s’en glorifier. Pourtant, elle peut l’impossible et l’arbre peut se jeter dans la mer. La force de la foi est toujours surprenante comme une graine de moutarde.
N’ayons donc pas peur d’être des serviteurs obscurs et inutiles. Notre valeur n’est pas dans l’apparence, mais dans une certaine qualité de présence et d’être. Notre humilité est même nécessaire au véritable développement de notre foi. Plus nous serons petits, plus notre prière sera puissante, surprenante, et plus elle nous laissera émerveillés. C’est cette expérience que le Seigneur nous propose en ce lieu béni, en cheminant avec l’humble Benoîte. Elle fera grandir en nous une foi humble et tellement puissante !
Père Michel Desplanches
Recteur