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Tuesday 3 July - Homélie de la première messe du père Jean-Marie Dezon
Dieu aime écrire droit avec des lignes courbes...
Par le père Jean-Marie Dezon
« Laissez les morts enterrer leurs morts » (Mat. 8,22). Voilà une parole de Jésus qui nous semble à la fois étrange si ce n'est extravagante, et bien peu réjouissante. En ce lendemain de fête, fête de la foi, de l'espérance, mais aussi de la charité, fête de l'Esprit se répandant dans les cœurs, voilà une parole qui semble dénoter un peu, sauf à nous dire qu'en réalité elle n'est pas autre chose qu'un appel à la liberté.
« Laissez les morts enterrer les morts ». Cela ne signifie-t-il pas que la vie est toujours à conquérir, qu'elle ne peut être libre et pleinement vivante sans les nécessaires ruptures, sans les déprises et les dépouillements parfois écartelants.
Vivre du Christ et de son Évangile, se conformer, se laisser configurer à lui, c'est avoir à triompher de nos pulsions de mort, savoir tourner des pages pour en écrire de nouvelles, ne pas rester prisonnier de notre passé, ne pas permettre au découragement de nous gagner, éclairer chacune de nos relations à la lumière de l'Évangile. Le chemin de la vie ne nous épargne pas des larmes, des déchirures, des échecs ou de ce nous estimons tels ; mais le chemin qui nous mène au Christ est jalonné d'appels à nous réconcilier avec nous-mêmes et avec nos frères, avec tous les événements que nous ressassons jusqu'à nous en rendre malades ; le chemin qui mène au Christ est un chemin de lumière. Enterrons la ténèbre, enterrons nos remords et nos peurs, soyons nous-mêmes enfants de lumière, porteurs de lumière. L'appel du Christ nous illumine et rend nos vies vraiment libres.
Durant ces dernières semaines, j'ai souvent médité ce beau proverbe arabe que vous connaissez peut-être : « Dieu aime écrire droit avec des lignes courbes ». Chacune de nos vies peut témoigner de la fidélité de Dieu, de sa prévenance, de sa permanence. Et même si nous avons parfois l'impression de ne plus trop savoir où nous allons, ce que nous faisons, même s'il nous est difficile de discerner la route à suivre à travers les inévitables morts à nous-mêmes et à nos projets de réussite, Dieu, lui, écrit tendrement, avec justesse, le livre sacré de nos existences, Dieu nous mène et éclaire nos pas, Dieu guérit nos plaies et nous dit d'avancer, Dieu agit dans nos écritures courbes et parfois brisées, et sa puissance se déploie dans nos vulnérabilités.
Avec vous aujourd'hui, je veux rendre grâce pour la vie que Dieu nous donne, pour le mystère de Pâques et la promesse d'éternité dont nos vies sont marquées, pour l'histoire sainte qu'Il veut écrire en nous, avec nous et à travers nous.
Que ce jour, que cette célébration soient portés par la louange et la gratitude. Notre reconnaissance va au Christ qui nous appelle à la fidélité de l'Évangile, qui nous dit « Suis-moi » et nous fais avancer sur les chemins du don et de la confiance.
Ma gratitude va au Seigneur qui bénit et instruit nos existences, et qui m'appelle désormais au service de ce diocèse des Hautes-Alpes. L'appel du Christ s'est fait entendre de multiples façons, ces deux dernières années, à travers l'accueil et le témoignage des prêtres de ce diocèse, à travers les signes forts reçus en ce sanctuaire du Laus, où Benoîte Rencurel nous conduit à Marie et où Marie nous conduit à son Fils. Il y a encore un an j'étais loin de m'imaginer à quel point la figure de Benoîte m'impressionnerait et nourrirait ma vie de prière. Avec Marie, avec tous les saints, elle intercède elle aussi auprès de Dieu pour nous. Benoîte a connu, aidé, accompagné tant de prêtres. Sa beauté de cœur, son âme brulante, sa prière ardente sont pour les prêtres d'hier et d'aujourd'hui, un bel exemple de ce que le Seigneur peut accomplir pour nous et en nous.
Parmi les épisodes de la vie de Benoîte je suis particulièrement touché par cette rencontre avec Marie, où la jeune bergère Benoîte se voit félicitée par la Vierge « de ne s'être point impatienter ». Belle leçon pour l'impatient que je suis, mais aussi belle pédagogie du Seigneur et de sa Mère.
Dans ce lieu, je veux particulièrement vous remercier, vous les prêtres du Laus qui êtes à présent mes frères dans le sacerdoce. Merci à toi Ludovic, merci Guy, René, Michel, sans oublier le Père André Fort.
Merci à tous ceux qui œuvrent à la vie du Laus. Merci à vous mes Soeurs... dont le chant est comme un avant-goût de la voix des anges. Au long des mois vous m'avez énormément apporté, et sans doute beaucoup plus que vous ne pouvez l'imaginer. Merci.
Et merci à vous tous pour votre fraternité et votre prière.
Ensemble, rendons grâce au Seigneur qui aime écrire droit avec des lignes courbes, qui nous dit : « Suis-moi », « ma puissance se déploie dans ta faiblesse ». Rendons grâce au Christ : « lui qui n'a pas une pierre où reposer sa tête », veut que nous reposions la nôtre au plus près de son cœur.
Amen.