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Sunday 20 May - Solennité de la Pentecôte
Spiritualiser nos vies !
Par le père Ludovic Frère, recteurQuelle grâce pour nous de vivre la Pentecôte dans un sanctuaire marial ! Car depuis l’Annonciation, l’Esprit-Saint et la Vierge vivent une proximité telle, qu’elle rejaillit nécessairement sur ceux qui s’approchent de Marie. Comme le disait Louis-Marie Grignon de Montfort, contemporain de Benoîte Rencurel, « quand l’Esprit Saint voit Marie dans une âme, il s’y précipite ». Il y a une telle connivence entre la 3e personne de la Sainte Trinité et la Mère du Sauveur que l’Esprit Saint se sent chez Lui dans une âme qui sait accueillir Marie. Il se sent alors aussi particulièrement chez Lui dans un lieu voulu par Marie.
Frères et sœurs, nous sommes donc dans un endroit privilégié pour saisir la présence de l’Esprit-Saint en ce jour de la Pentecôte. La Vierge Marie peut vraiment nous ouvrir à la fécondité de l’Esprit, elle qui sût se rendre disponible à son agir pour donner naissance au Sauveur du monde. Laissons donc la Vierge Marie nous convier à la rencontre avec l’Esprit Saint !
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Marie était peut-être là, discrètement présente sur les bords du Jourdain, quand son fils fut bapisé et que l’Esprit descendit sur lui « comme une colombe », disent les évangélistes. Ils s’intéressent bien sûr davantage ici au mouvement de descente de l’Esprit qu’à la forme d’un volatile. De même qu’il planait sur les eaux au commencement du monde, l’Esprit Saint ne cesse de descendre pour féconder toute chose comme il a fécondé le corps de Marie.
La Vierge Marie était là aussi, avec les apôtres au Cénacle, quand l’Esprit descendit sur eux. Dans la première lecture, c’est par l’image du vent et l’image des langues de feu que l’Esprit Saint manifeste ses effets. Mais toujours avec cette attention à ne pas Le réduire à ces images : « un bruit survint du ciel comme un violent coup de vent », mais c’est bien plus qu’un vent. « Alors, des langues qu’on aurait dites de feu leur apparurent », mais c’est bien plus qu’un feu.
Comme un feu, comme un vent, comme le mouvement de descente d’une colombe : voyez combien l’Esprit-Saint est insaisissable ! Insaisissable et puissant à la fois, tel un grand vent qui secoue les murs et un feu que rien n’arrête.
Insaisissable pour que nous nous gardions aussi de vouloir matérialiser l’Esprit. C’est une tentation redoutable pour nous qui aimons maîtriser les choses ; alors, quand on nous parle de pur Esprit, on a tendance à vouloir matérialiser son être ou ses effets. Mais c’est le contraire qui nous est demandé : par l’Esprit Saint qui descend sur nous, ce n’est pas à nous de Le matérialiser mais c’est à Lui de nous spiritualiser !
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La solennité de ce jour est faite pour laisser l’Esprit Saint spiritualiser nos vies ! Non pas pour nous faire planer au-dessus de la réalité bien sûr, mais pour nous centrer sur l’essentiel de ce qui fait une vie humaine : la valeur de l’esprit.
Dans le projet du Créateur, l’esprit de l’homme était la partie la plus haute de son être et c’est à lui que le corps et le psychisme devaient être assujettis. Les besoins corporels comme ceux de l’intelligence et de l’affectivité, tout était heureusement subordonné à la partie la plus haute de l’être humain qui le relie à Dieu.
Mais la tentation était grande d’inverser les choses : au lieu d’assujettir le corps et le psychisme à ce qui l’unit au Ciel, l’homme a pensé pouvoir trouver son bonheur en mettant au sommet de son être les besoins du corps et les satisfactions psychiques. C’est ce que saint Paul appelle, dans la 2e lecture, les « tendances de la chair » : un investissement déraisonnablement dans les besoins du corps, dans l’apparence physique et dans tout ce qui nous centre sur nous-mêmes. Il faut alors qu’un violent coup de vent vienne nous secouer, comme les disciples au Cénacle. Nous secouer et ouvrir nos portes.
Par le vent de l’Esprit, notre âme est remise en disponibilité à recevoir la vie divine pour la transmettre jusqu’au psychisme et jusqu’au corps. Nous sommes alors rétablis dans notre juste sens et nous redécouvrons la finalité de notre existence qui est son déploiement éternel ! Rempli de l’Esprit Saint, notre esprit s’élève. Il ne se focalise plus sur ses désirs, il ne s’arrête plus aux contrariétés, il ne se soucie plus des comparaisons avec les autres.
Alors, en ce grand jour de la Pentecôte, laissons vraiment nos âmes vivre de l’Esprit Saint ! Laissons toute la place en nous à l’Esprit, en évacuant les autres préoccupations auxquelles nous laissons trop souvent la primauté au détriment de la vie de l’esprit.
Si vous voulez trouver la paix, si vous aspirez à la joie véritable, ne cherchez pas ailleurs car sinon vous serez toujours déçus. Seul l’Esprit Saint peut nous vivifier et produire en nous ses fruits délicieux : « amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, fidélité, douceur et maîtrise de soi », nous a dit saint Paul. Les magnifiques fruits de l’Esprit !
L’Esprit Saint n’est donc pas donné pour que nous ressentions des vibrations. Il vient rejoindre le plus profond de nos âmes ; et celles-ci, tellement heureuses d’y recevoir leur Dieu, peuvent ensuite nous faire éprouver une paix et une joie qui ne viennent pas du monde.
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« Amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, fidélité, douceur et maîtrise de soi ». On dirait là un portrait de la Vierge Marie ! Oui, celle qui s’est laissée féconder par l’Esprit et qui l’a gardé au fond de son âme sans jamais Le contrister, nous la voyons mère joyeuse et paisible, patiente et bonne, bienveillante et fidèle, douce et maîtresse d’elle-même.
Fêter la Pentecôte en un sanctuaire marial, c’est donc nécessairement contempler comment l’Esprit agit en Marie : comment il la rend douce et bienveillante, patiente et joyeuse, pour que de tels fruits de l’Esprit présents dans cette mère puissent devenir présents aussi dans l’âme de ses enfants.
Laissez donc la Vierge Marie favoriser votre rencontre avec l’Esprit Saint. Laissons tous ensemble notre Mère nous faire rencontrer communautairement l’Esprit d’unité, l’Esprit de communion. Laissons la Vierge Refuge des pécheurs déployer largement les voiles de nos vies pour les gonfler du souffle de l’Esprit et nous laisser guider où Il veut.
Nous vivrons ainsi ce que Jésus invitait Nicodème à accueillir, au chapitre 3 de saint Jean : « Ne sois pas étonné si je t’ai dit : il vous faut naître d’en haut. Le vent souffle où il veut : tu entends sa voix, mais tu ne sais ni d’où il vient ni où il va. Il en est ainsi pour qui est né du souffle de l’Esprit » (Jn 3,7-8).
Amen.