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Sunday 4 June - Solennité de la Pentecôte
Remplis de l'Esprit Saint !
Par le père Ludovic Frère, recteur« Tous furent remplis d’Esprit Saint » ! Ce qui se passe aujourd’hui pousse les disciples au-dehors et va bientôt les conduire jusqu’aux extrémités du monde. Un mouvement de sortie de soi ; mais pour que ça sorte de soi, il faut d’abord que ça y habite. Voilà le don de la Pentecôte : « Tous furent remplis d’Esprit Saint ».
Jusqu’alors, les disciples avaient vécu en compagnie de Jésus. Depuis peu, le Maître avait annoncé : « il vaut mieux pour vous que je m’en aille » (Jn 16,7). Une fois monté aux Cieux, le Fils uni au Père envoie l’Esprit, qui rejoint l’âme des disciples. Ou plutôt non : pas seulement qui les rejoint, mais qui les REMPLIT !
Une réalité nouvelle survient alors pour eux : le Seigneur n’est plus seulement « au-dessus » comme Créateur, ni « à côté » comme maître et ami ; Le voilà désormais au plus profond de leur être, comme Celui qui remplit tout, pour les faire sortir au-dehors d’eux-mêmes et de leurs maisons verrouillées.
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Frères et sœurs, cette grande fête de la Pentecôte doit conduire à nous émerveiller du grand mystère qui nous habite : L’Esprit Saint veut et vient nous remplir jusqu’à l’intime !
Nous ne sommes pas que des créatures fragiles sur lesquelles un Dieu bienveillant jetterait fréquemment un coup d’œil. Nous sommes désormais les temples de l’Esprit Saint ! Nous portons en nous la 3e personne de la Très Sainte Trinité. Oui, « en nous » ! Nous portons Dieu ! Je porte Dieu, chacun de vous porte Dieu. Même une sœur ou un frère chrétien pénible, insupportable, bizarre ou qui ne pense pas comme moi : il ou elle porte Dieu ! Ça nous dérange peut-être parfois, mais c’est le grand mystère de ce que nous sommes : remplis de l’Esprit Saint, nous portons Dieu !
Surtout, que personne ne prétende ne pas en être assez digne ! De toute façon : personne ne l’est. Mais être rempli de l’Esprit Saint n’est pas une récompense, c’est un mystère et une mission ! Un mystère que ce jour nous appelle à aller chercher au plus profond de nous-mêmes, dans le silence et la douceur. Oui, Tu es là, Esprit Saint : « Consolateur souverain, hôte très doux de nos âmes, adoucissante fraîcheur », avons-nous chanté dans la séquence.
L’Esprit Saint est l’hôte très doux de nos âmes. Désormais, nous portons Dieu comme notre hôte intérieur ! L’Esprit Saint habite en nous ; C’est Lui qui est notre vie. C’est Lui qui éclaire nos consciences pour nous guider ; c’est Lui qui maîtrise nos corps pour qu’en toute chose, ils rendent gloire au Créateur ; c’est Lui qui met le feu à nos sentiments, pour qu’ils soient vraiment intenses de la folie du Christ ! C’est Lui qui ravive nos volontés pour qu’elles nous fassent persévérer dans le bien.
C’est l’Esprit Saint qui rejoint les profondeurs obscures de nos pensées compliquées et parfois perverses. C’est Lui qui vient embrasser tout notre être, corps, âme, esprit : là où nous-mêmes ne nous connaissons pas vraiment. C’est Lui qui vient rejoindre les liens les plus intimes de notre mémoire et de notre intelligence.
C’est Lui qui est indéfectiblement le ciment de nos engagements et le lien de nos relations interpersonnelles. C’est Lui qui maintient dans l’unité les membres si divers de l’unique corps du Christ que nous formons par le baptême. C’est Lui qui tient dans la fidélité les couples mariés et les consacrés. C’est Lui qui est source de toute bénédiction et qui nous fait du bien !
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Quel grand mystère nous habite ! La Pentecôte est une fête qui nous pousse au-dehors, mais qui nous fait aussi contempler le mystère qui nous habite au-dedans.
Car nous passons peut-être le plus clair de notre temps dans une extériorité aussi inutile qu’épuisante. Notre monde actuel se nourrit d’ailleurs de cette erreur existentielle, qui nous fait croire que le bonheur est dans l’extériorité de notre être. Alors, on cède aux sirènes de la consommation et de la communication, sans jamais y trouver de quoi se rassasier pleinement.
C’est qu’aucune réalité humaine, fut-elle le plus beau des amours, ne peut remplir un cœur humain. Les amitiés, les projets, les bons moments : tout cela est précieux et nécessaire. Mais nous le savons, même si nous l’oublions parfois : nous nous épuisons à rechercher dans les choses terrestres ce dont seul l’Esprit Saint peut nous combler entièrement, jusqu’à l’intime.
En ce jour de la Pentecôte, acceptons donc de ne plus nous remplir - ou de moins nous remplir - de ce qui ne comble pas. Pour être remplis d’Esprit-Saint, il faut Lui laisser de la place. Remarquez d’ailleurs que les personnes qui nous touchent le plus, ce ne sont pas celles qui sont esclaves du dehors. Tous ceux qui paradent sur les tapis du festival de Cannes ou d’ailleurs, tous ceux qui veulent « passer à la télé » comme une sorte de consécration de vie ; ce ne sont pas ces gens-là qui nous touchent.
Bien au contraire. Ce sont les humbles, ceux qui paraissent tellement vidés d’eux-mêmes que le mystère de leur intériorité jaillit presqu’au dehors. Pensez à une Mère Teresa ou une Sœur Emmanuelle : elles étaient tellement remplies de l’Esprit-Saint, qu’Il semblait briller dans leurs yeux pétillants et traverser leurs peaux ridées.
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Pour être remplis de Lui, il faut se vider soi. L’Esprit-Saint vient remplir ce que nous laissons de disponible. La voilà, notre conversion véritable ; la voilà, la raison d’être d’un lieu de grâce comme le sanctuaire du Laus. Il n’y a d’ailleurs pas un seul sanctuaire dans lequel la Vierge Marie n’appelle ses enfants à la conversion. Cette conversion-là, comme un chemin plus qu’un état : accepter de se vider toujours un peu plus de soi-même, pour que l’Esprit-Saint trouve de la place, toujours plus de place.
Pour cela, la Vierge Marie veille sur nous et accompagne nos conversions. Car bien qu’elle fut présente à la Pentecôte, Marie avait déjà pour ainsi dire, vécu sa propre Pentecôte quand elle avait dit oui à l’ange Gabriel : elle s’était vidée d’elle-même, se donnant corps et âme pour que l’Esprit-Saint repose en elle et engendre le Sauveur du monde.
Remplis de l’Esprit de Pentecôte, nous devenons comme Marie un peuple qui engendre le Christ dans le monde ; ce monde qui a tellement besoin d’un sauveur, mais qui a plutôt tendance à le chercher dans un jeune président ou un sportif valeureux, au lieu de l’accueillir en écoutant les profondeurs de l’être, là où l’Esprit-Saint dit : « Je viens. Me laisseras-tu de la place ? »
Parce qu’Il est en Personne l’engendrement du Fils par le Père de toute éternité, l’Esprit Saint continue jusqu’à la fin des temps son œuvre d’engendrement. C’est Lui qui engendre de nouveaux enfants dans l’Église ; c’est Lui qui engendre en nous des pensées de paix et d’amour ; c’est Lui qui engendre les réconciliations les plus inespérées ; c’est Lui qui engendre les vocations et les charismes.
C’est Lui qui nous engendre chaque jour à une vie nouvelle, sans plus nous soucier du passé. Oui, « Oubliant ce qui est en arrière, et lancé vers l’avant », dit la lettre aux Philippiens (3,13)… voilà comment l’Esprit-Saint oriente aujourd’hui notre vie pour l’engendrer encore, et encore, jusqu’à l’éternité ! Amen.