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Tuesday 24 December - Messe de la nuit de Noël
Noël de Lumiere !
Par le père Ludovic Frère, recteur du sanctuaire
Lorsqu’il a choisi de naître en pleine nuit, je ne sais si le Seigneur avait pensé aux routes hivernales des Hautes-Alpes, au sommeil des enfants ou à la combinaison délicate entre un dîner festif et une célébration fervente ! Un autre moment de la journée aurait été plus pratique que la nuit, mais tellement moins signifiant !
Né dans l’obscurité, célébré en cette longue nuit – l’une des plus longues de l’année – Jésus-Christ nous rejoint ainsi : non pas dans la clarté du plein jour, mais au cœur de la nuit, comme pour nous dire que sa lumière est venue rejoindre toutes nos nuits.
Certainement ce soir, nous voulons entendre parler davantage de lueur que d’obscurité. Noël, c’est une ambiance portée par le scintillement de lumières et les visages radieux d’enfants émerveillés. S’il y a bien un soir de l’année où nous voudrions mettre de côté tout ce qu’il peut y avoir de plus obscur dans la vie du monde comme dans nos vies personnelles, c’est cette nuit !
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D’ailleurs, ce n’est pas seulement vrai pour nous, qui nous serrons les coudes sur les bancs d’une église : en ce moment, ils sont nombreux à être rassemblés autour d’une table ou d’un sapin pour faire la fête, sans toujours savoir pourquoi mais avec le désir sincère d’une soirée de joie, une nuit de lumière dont les rues de nos villes et de nos villages nous parlent depuis des semaines par leurs décorations scintillantes.
Ce soir, nous sommes donc unis à tous ceux qui veulent davantage de lumière dans le monde et dans leur vie. Beaucoup ne sont pas venus à l’église ; ils n’ont pas voulu, n’y ont pas pensé, n’ont pas vu de sens à cette démarche. Je vous propose que nous ne les prenions pas de haut : nous ne sommes certainement pas meilleurs que ceux qui sont restés autour d’une table de fête, en revanche nous pouvons être dans cette église leurs porte-paroles, leurs ambassadeurs auprès de Dieu : les ambassadeurs d’une humanité qui veut le bonheur et qui souhaite si ardemment plus de lumière au cœur des nuits du monde.
Porte-paroles de notre monde assoiffé et si souvent apeuré, nous levons les mains vers le Ciel : "Seigneur, envoie ta lumière ! Réchauffe notre terre ! "
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Mais alors que nous aurions déjà trouvé bien précieux de recevoir ne serait-ce qu’un éclairage venu d’En-Haut - comme le Seigneur l’avait déjà fait bien des fois au cours de l’histoire -, nous accueillons ce soir non pas un peu de lumière, mais la Source de la lumière qui vient reposer sur notre terre.
Cette nuit, Dieu nous est donné comme un cadeau, le plus beaux de tous ceux qui peuvent être offerts ; le cadeau d’une espérance, d’une lumière plus forte que les ténèbres ; la naissance d’un sens à la vie : « voici que je vous annonce une bonne nouvelle, dit l’ange aux bergers, une grande joie pour tout le peuple : aujourd’hui vous est né un Sauveur ».
Mais justement, puisque cette nouvelle est bonne - et pour qu’elle soit bonne - nous sommes invités ce soir non pas à vivre un moment de fête en oubliant nos soucis. Noël n’est pas un moyen de mettre entre parenthèses, le temps d’une nuit, toutes les obscurités de l’existence. C’est au contraire la grâce de pouvoir les présenter au Seigneur, en pleine nuit, pour que la Source de la lumière descendue jusqu’à nous les éclaire totalement et définitivement, comme elle le fait auprès des bergers : « L'ange du Seigneur s'approcha, et la gloire du Seigneur les enveloppa de sa lumière ».
La fête de Noel n’est donc pas une trêve de quelques instants, avant de reprendre la vie et ses difficultés. Elle est au contraire un consentement à ce que toutes nos préoccupations et tous nos drames soient déposés dans la crèche, présentés à ce petit enfant, placés dans la lumière divine que porte son doux regard pour que nous recevions cette annonce angélique : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes qu'il aime. »
Soucis de santés, problèmes de familles que ces fêtes peuvent parfois davantage raviver qu’apaiser, deuils que les doux souvenirs des Noëls du passé viennent rappeler à la mémoire, solitude que cette nuit festive met davantage en évidence… ce soir n’est pas joyeux pour tout le monde ; et le reconnaître, ce n’est pas gâcher notre fête, c’est la rendre bien plus dense qu’une simple soirée de bouffe et de cadeaux.
Car pour tous - malades, veufs, personnes seules et ceux qui portent une souffrance ou une inquiétude profonde -, cette nuit peut être l’occasion d’entrer dans la crèche et de laisser la lumière de l’enfant Jésus nous éclairer vraiment. Ce soir, en nous approchant du Christ né de la Vierge Marie, tout devient lumière ! Oui, tout devient lumière ! Entendez-vous, frères et sœurs ? Il n’y a plus seulement un peu de clarté venant d’En-haut : non, ce soir, c’est Dieu qui se couche dans la paille et qui nous dit : « tu vois, je suis là. N’aie donc plus peur ! » Tout devient lumière
Le vague espoir qu’il y ait quelque chose au-dessus de nous devient la lumineuse espérance de "Dieu-avec-nous", "l’Emmanuel". Le triste constat que nous avons tant de mal à accomplir le bien que nous voudrions faire devient une éclatante confiance en Dieu qui nous sauve, « Jésus » !
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« Aujourd’hui vous est un sauveur ! » Un Sauveur qui ne se conquiert pas en gravissant laborieusement les marches de la perfection, mais qui s’accueille comme on le fait d’un enfant déposé dans nos bras. Un Sauveur qu’on n’achète pas avec de l’or ou des prières, mais qu’on découvre sur la paille, fragile nouveau-né, obligeant à s’abaisser pour pouvoir l’embrasser. Et plus nous nous penchons vers son berceau en forme de mangeoire, plus sa lumière nous éclaire et nous réchauffe. Les prétentieux, qui refusent de s’incliner, resteront dans l’obscurité et ne pourront faire de Dieu qu’un concept ; mais ceux qui consentent à se pencher pour voir de plus près le visage du Dieu fait homme seront illuminés, selon la promesse chantée par le psalmiste : « qui regarde vers Dieu resplendira, sans ombre ni trouble au visage ».
Frères et sœurs, voulons-nous être ainsi éclairés ? Souhaitons-nous une vie qui soit davantage dans la lumière ? Si c’est non, retournons tout de suite à nos obscurités ; si c’est oui, regardons le Sauveur dans la crèche ! En cette nuit, approchons-nous de celui qui a révélé : « je suis la lumière du monde. Celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres, il aura la lumière de la vie » (Jean 8,12) !