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Wednesday 5 March - Mercredi des cendres
N'ayons pas un goût de cendres !
Par le père Ludovic Frère, recteur du sanctuaireIl y a des paroles fortes que l’on retrouve chaque année et qui tracent les grandes lignes de ce que nous sommes appelés à vivre, avec toute l’Eglise, au long de notre marche de Carême. La première de ces paroles, tirée du livre de la Genèse, rappelle à toutes les générations, depuis des millénaires, cette réalité de notre condition humaine : « tu es poussière et tu retourneras en poussière ».
A cet aveu réaliste se joignent d’autres paroles, car le mercredi des cendres, c’est aussi ce cri du Seigneur entendu dans la première lecture : « revenez à moi de tout votre cœur » ! C’est ce chant du psaume 50 : « Seigneur, rends-moi la joie d’être sauvé ». C’est l’exhortation de saint Paul dans la deuxième lecture : « laissez-vous réconcilier ». C’est encore ces paroles fortes de l’Evangile : « que ta main gauche ignore ce que donne ta main droite », « n’agissez pas pour vous faire remarquer », « ne prenez pas un air abattu ».
Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’en ce jour de jeûne, nous voici bien nourris !
Poussière, conversion, joie d’être sauvé, réconciliation, humilité, charité désintéressée, … il faudra bien 40 jours pour savourer tout cela ; 40 jours pour mettre en pratique un chemin de vie aussi fondamental et libérateur, un chemin d’ouverture résolue à Dieu et aux autres !
Oui, chaque année, par les mêmes paroles, le Seigneur nous rejoint et nous interpelle. Il nous interroge : que feras-tu de ton Carême ? Nous priver de Nutella ou de viande le vendredi, pourquoi pas… mais est-ce bien là l’essentiel ? Que feras-tu de ton Carême ?
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Dans les circonstances actuelles de nos vies personnelles et de la vie du monde, qu’est-ce qui pourra vraiment porter du fruit au cours de notre longue marche vers la lumière de Pâques ? N’est-ce pas justement d’être des témoins de cette lumière ?
On a beaucoup commenté cette phrase du pape François dans son exhortation apostolique sur la joie de l’Evangile : cessons d’avoir « des airs de Carême sans Pâques », disait le saint Père ! Nous savons ce que c’est d’avoir une face de Carême : un visage blême, froid, émacié, comme s’il portait la marque de ses privations. Est-ce donc cela que le Seigneur attend de nous ? Est-ce donc cela dont notre monde a besoin ? Est-ce vraiment cela que notre cœur nous réclame ?
Jésus vient de nous dire dans l’Evangile : quand tu jeûnes, parfume-toi la tête ! Sens bon ! Par tout ce que tu fais, par tes actes et ton sourire, par tes paroles et tes attentions aux autres, sens bon ! Oui, frères et sœurs, sentons bon au cours de ce Carême !
N’ayons pas un goût de cendres, n’ayons pas des faces de Carême sans Pâques, ne vivons pas sans espérance ! Ne marchons pas dans la vie avec ses difficultés, sans la lumière du Ressuscité ! Ne pratiquons pas notre foi sans la laisser transfigurer nos visages ! Ne célébrons pas le Seigneur sans qu’une joie profonde nous unisse les uns aux autres ! N’ayons pas un goût de cendres !
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Un bon Carême, ce n’est donc sans doute pas d’abord un Carême sans chocolat ou sans cigarettes, mais un carême sans nous laisser entraîner par des sentiments de désespoir, de désillusion ou de désunion.
En ce premier jour du chemin pascal, prenons donc les armes de l’espérance et gardons-les fermement en mains, même quand nous rencontrerons des personnes que nous n’aimons pas trop, même quand nous peinerons à prier fidèlement, même quand nous regarderons les informations télévisées, même quand nous aurons l’impression de ne pas avancer dans la vie : gardons les armes de l’espérance !
Un bon Carême, c’est certainement un Carême qui suscite en nous et entre nous espoir et confiance.
Alors, allons-y ! N’abordons pas ces 40 jours comme un mauvais moment à passer ! Ne vivons pas le Carême en oubliant son terme. Soyons des témoins de l’espérance dont notre monde a tant besoin, dont chacune de nos familles a tant besoin et que chacun de nos cœurs réclame au profond de lui-même : espérance ! Voilà ce que nous crie le Carême : espérance !
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Oui, Seigneur, nous sommes poussières et nous retournerons à la poussière ; mais nous sommes des poussières pleines d’espérance, car nous ne sommes pas les cendres d’un feu qui est mort ; nous sommes les cendres d’un feu appelé à jaillir en vie éternelle !
Amen.