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Tuesday 3 November - Bonnes excuses et grands désirs
Mardi 3 novembre 2020, 31e TO - Messe pour soutenir ceux qui travaillent
Par le père Ludovic Frère, recteurLa parabole des bonnes excuses ! C’est ainsi que l’on pourrait appeler cet enseignement du Christ : « ils se mirent tous, unanimement, à s’excuser. » Le premier : « J’ai acheté un champ, et je suis obligé d’aller le voir ; je t’en prie, excuse-moi. » Le deuxième : « J’ai acheté cinq paires de bœufs, et je pars les essayer ; je t’en prie, excuse-moi. » En temps de confinement, ces hommes n’auraient certainement pas eu l’autorisation de visiter un champ ou d’essayer des bœufs. Autrement dit : les activités empêchées par le confinement sont l’occasion de débusquer les bonnes excuses derrière lesquelles nous pouvons nous réfugier pour ne pas nous impliquer dans autre chose.
À part chez ceux qui sont sur-occupés en période de confinement – et il y en a, prions pour eux ! -, chez les autres, cette interrogation me semble bienvenue et profitable : en étant confiné, on ne peut plus se dire : « je n’ai pas le temps », on doit dire : « je ne prends pas le temps pour ceci ou pour cela ». Le confinement est donc une bonne occasion pour discerner, à travers notre gestion du temps, ce qui habite vraiment nos cœurs.
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Les invités du dîner n’avaient visiblement pas envie de s’y rendre. Leur désir de s’occuper d’un champ ou de bœufs était plus grand que leur désir de répondre à l’invitation au banquet. C’est bien là un problème de désir.
Alors, où est-il, frères et sœurs, notre désir de Dieu, notre désir du Ciel, notre désir d’aider les autres ? Quel est notre désir de prière, notre désir de confession, notre désir de lectures spirituelles, notre désir de méditer la Parole de Dieu ? Selon le baromètre de ce désir, vous trouvez certainement du temps pour le faire ou de bonnes excuses pour ne pas le faire.
Après avoir vécu la fête de la Toussaint et la commémoraison des fidèles défunts, c’est comme si la Parole de Dieu nous appelait à en tirer des conséquences personnelles. L’orientation de nos vies vers leur déploiement éternel dépend de ce que nous faisons de notre temps d’aujourd’hui. On lit dans l’histoire du Laus qu’un ange dit à Benoîte d’avertir une personne qu’elle emploie mieux son temps ; un jour, elle en rendra compte à Dieu.
Car la sainteté, c’est sans doute d’abord cela : avoir un grand désir de Dieu et d’aimer, désir qui se cultive en prenant du temps pour Dieu et pour aimer les autres. C’est donc à la mesure de notre désir que le Seigneur peut se donner. Pensez donc ! Dieu qui est Amour n’attend que cela : déverser sur nous et sur le monde des torrents de grâces et de bénédictions ! Mais le canal pour que passent tant de bienfaits, c’est notre désir personnel et communautaire. Plus nous crions notre désir, plus le Seigneur peut passer. Plus nous aiguisons notre désir dans la prière, plus la grâce de Dieu peut nous transformer.
L’humilité de Dieu est telle qu’Il se donne à la mesure de notre désir. Au sanctuaire du Laus, c’est bien ce qu’a vécu Benoîte Rencurel. Elle avait entendu un sermon de son curé, disant que la Mère de Dieu était toute bonne et toute miséricordieuse. Ça avait touché le cœur de la jeune Benoîte ; elle s’était alors dit qu’elle aimerait tant voir la Vierge Marie. Quelques temps plus tard, la Belle Dame lui apparaissait. La Mère de Dieu a répondu à Benoîte à la mesure de son grand désir.
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Permettez-moi alors une question, plutôt une invitation : en France, nous vivons notre deuxième confinement, comme c’est le cas aussi dans bien d’autres pays depuis lesquels vous êtes connectés à notre sanctuaire.
Le premier confinement avait été suffisamment bouleversant pour nous faire revoir sans doute certaines priorités de vie et discerner alors nos grands désirs. Que sont devenus ces priorités et ces désirs une fois le confinement terminé ? Est-ce qu’ils ont transformé votre vie ? Est-ce qu’il vous ont fait revoir votre gestion du temps ?
L’entrée dans ce 2e confinement est alors l’occasion de faire le point : si les grands désirs éveillés pendant le 1er confinement se sont évanouis dès que la vie a repris de manière quasi normale, il est temps de les retrouver, ces grands désirs, et de leur laisser vraiment de la place pour qu’à la sortie du 2e confinement, ils ne soient pas à nouveau étouffés par la reprise de la vie ordinaire.
Pour vous y aider, je vous propose de faire deux choses, aujourd’hui. Comme deux conseils.
Le premier, c’est de sélectionner vos désirs. Ne pas répondre en un clic au désir qui vous passe par la tête, qu’il soit alimentaire, qu’il soit désir de boire, qu’il soit désir d’acheter sur internet. Ne répondez pas en un clic au désir qui vous traverse, mais prenez le temps de discerner la vérité de ce désir : qu’est-ce qu’il dit de ce que vous êtes et de ce que vous voulez encore devenir ? Prenez le temps de sélectionner vos désirs pour choisir ceux qui vous grandissent vraiment.
Le deuxième conseil, c’est de croire coûte que coûte que le Seigneur répond aux grands et beaux désirs. On ne le constate pas toujours, on n’en a pas les preuves intangibles. Mais on en a la conviction de foi : « demandez, vous recevrez », promet Jésus. Il n’affirme pas : « demandez, vous constaterez », mais bien « vous recevrez ». Alors, quand vous avez l’impression que votre désir n’est pas exaucé, patientez - car Dieu est Maître du temps- et rendez grâce - parce que Dieu exauce nécessairement selon Sa volonté.
Au final, la vie spirituelle, c’est la rencontre de deux grands désirs : Celui du Seigneur et le nôtre. La prière vise à accorder notre désir à celui de Dieu. Les actes de charité visent à concrétiser notre désir d’accomplir le désir de Dieu.
Voilà alors l’Eucharistie, qui vient sceller et raviver sans cesse cette alliance de deux désirs : désir du Christ et désir de l’Église, désir du Seigneur et désir personnel. Alors, au cours de cette messe, désirez, désirez encore ! Désirez faire de chez vous et de vous-mêmes un tabernacle accueillant le Dieu vivant ! Désirez faire de votre vie une louange au Seigneur ! Désirez revenir dans vos églises dès que ce sera de nouveau possible ! Et, par-dessus tout, pour vous et pour tous : désirez le Ciel ! Amen.