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Thursday 22 June - Messe du dimanche 25 juin 2017
L’équipement du motard
Par père Ludovic Frère, Recteur du sanctuaire Notre-Dame du LausIndéniablement, la moto procure une exceptionnelle sensation de liberté. Liberté, oui, mais pas à n’importe quel prix : il est non seulement interdit - mais il serait surtout proprement inconscient – de faire de la moto tête découverte, en short et chemisette. L’heureuse liberté que procure la moto se paye au prix du port d’un casque qui vous enserre la tête et de solides vêtements qu’on apprécie modérément avec les chaleurs de ces jours-ci. Mais il n’y a pas à hésiter : un tel équipement est nécessaire à la survie.
Dans la vie spirituelle, c’est la même chose. Les lectures de ce dimanche nous présentent la vie chrétienne comme un combat, une route sinueuse, avec des obstacles et même des opposants. Il serait alors fou de s’y aventurer sans avoir, là aussi, un solide équipement. Comme le casque ou la combinaison de moto, cet équipement est certainement une contrainte, mais c’est la condition de la survie spirituelle et du salut éternel.
Dans la lettre aux Ephésiens, saint Paul présente justement l’équipement nécessaire pour lutter contre les attaques du mal et persévérer jusqu’au bout dans le combat de la vie et de la foi. Au chapitre 6 de cette lettre aux Ephésiens, l’Apôtre évoque notamment « le casque du salut » et la « cuirasse de la justice »… rien à envier aux tenues des motards ! Un casque pour éviter de se casser la tête sur les problèmes de l’existence ; et une cuirasse pour être protégé en cas de chute…
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De même qu’un casque de moto protège la tête, le « casque du salut » protège ce qu’on appelle les 3 puissances de l’âme - l’intelligence, la mémoire et la volonté. Oui, ce qui nous protège notre intelligence, notre mémoire et notre volonté, c’est de nous savoir sauvés. Ce qui protège notre tête contre toutes les passions incontrôlées, les colères, les peurs de l’avenir, les craintes de toutes sortes… ce qui évite à notre esprit de se casser en deux devant les difficultés de la vie, c’est de savoir que le Christ nous a sauvés.
C’est cela, le casque du salut ! Savoir que notre vie ne se limitera pas aux quelques trop courtes années sur Terre ; savoir que le Seigneur miséricordieux ne nous enferme jamais dans un passé peu glorieux ; savoir que le Dieu tout-puissant nous unit les uns les autres par son Esprit-Saint, car nous sommes tellement incapables de faire l’unité par nos seules forces... C’est tout cela, le casque du salut !
On peut dire qu’ici, à Notre-Dame du Laus, Benoîte a porté sans faillir un tel casque. Elle a avancé, sans crainte, affrontant toutes les adversités. Car elle avait saisi, au plus profond de son âme, le salut de Dieu. En recevant notamment la grâce d’une visite au paradis, comme en laissant la Vierge Marie et les anges lui sourire si souvent, Benoîte Rencurel a goûté la joie du salut. Elle y a puisé sa force contre tous ceux qui la moquaient, la traitant d’idiote ou de sorcière. Elle a tenu bon face aux attaques du démon et contre la tentation du désespoir… terrible tentation à laquelle elle aurait sûrement succombé, si elle avait laissé de côté le casque du salut.
Alors, chers amis motards, à chaque fois que vous mettez votre casque, je vous invite à invoquer le Sauveur du monde, celui qui donne le salut gratuitement. Invoquez-le, non seulement pour éviter un accident sur la route, mais plus encore pour que confesser le Christ comme Celui qui donne sens et force à votre chemin de vie, sur la route parfois bien sinueuse qui conduit à la sainteté.
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Le deuxième grand équipement proposé par saint Paul dans la lettre aux Ephésiens, il l’appelle « la cuirasse de la justice ». Si les progrès techniques permettent aujourd’hui aux motards d’avoir des combinaisons de plus en plus légères mais pas moins résistantes qu’auparavant, il faut quand même reconnaître que ces combinaisons sont un poids à porter. Mais c’est le seul contact potentiel avec le sol en cas de chute. Sans une telle cuirasse, la peau peut gravement s’écorcher.
Eh bien, c’est vrai aussi dans la foi et dans toute la vie : si l’on tombe lourdement au sol, notre seule protection, c’est la cuirasse de la justice. La cuirasse de la justice, c’est comme une deuxième peau venue d’En-Haut, qui vient recouvrir notre peau humaine si fragile.
La cuirasse de la justice, c’est savoir que, par nos seules forces, nous sommes capables de bien peu de choses, mais le Christ est notre justice : c’est-à-dire que c’est Lui qui nous « ajuste » à son Père. Pour nous, c’est impossible ; nous ne sommes jamais, par nous-mêmes, assez ajustés à la beauté infinie de Dieu. Mais le Fils éternel a pris chair, il est devenu l’un de nous, il a porté la croix, il a donné sa vie, il a traversé la porte du tombeau pour nous ajuster au Père, par la force de l’Esprit Saint.
Alors nous, chrétiens, portons joyeusement la cuirasse de la justice ; ne quittons jamais cette tenue essentielle, par laquelle nous sommes prémunis de nous écorcher trop gravement dans la vie.
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Alors, c’est entendu : motards ou non, l’équipement nous est donné, il est gratuit et absolument nécessaire ! Casque et grosses combinaisons peuvent sembler bien lourds ; on pourrait préférer se balader à bras nus et cheveux aux vents. Mais si Jésus promet que nos cheveux sont tous comptés, il nous donne le casque du salut et la cuirasse de la justice, sans lesquels nous nous mettons en péril,
dès maintenant et pour l’éternité.
Par le carburant de la présence eucharistique du Seigneur, nous avançons, jour après jour, les uns avec les autres, jusqu’à parvenir au terme de notre vie. Et au Ciel, c’est promis : il n’y aura plus besoin ni de casque ni de combinaisons : nous serons libres de tout, cheveux au vent du souffle de vie éternelle… libres, libres pour toujours !
Amen.