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Sunday 19 June - Fête de la Sainte Trinité
"Imprévisible Trinité..."
Par le Père Ludovic Frère, recteur du sanctuaire
Pourquoi nous contenter de peu, quand le Seigneur nous offre tellement plus ? On pourrait résumer par cette question tout l’enjeu de la fête que nous célébrons ce dimanche, tant le mystère de la Sainte Trinité peut nous sembler bien obscur ou bien éloigné de nos préoccupations quotidiennes.
La fête de ce jour nous offre cependant d’entrer plus en profondeur dans ce grand mystère, puisque c’est le Seigneur qui nous y invite Lui-même en révélant son Etre-même ; une révélation qui a des incidences fondamentales sur nos vies.
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Certes, le mot de Trinité n’est présent nulle part dans la Bible. Mais Jésus révèle souvent son égalité avec le Père : de toute éternité, il est sont Fils, comme il le redit aujourd’hui : « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique ». Et l’Esprit-Saint, révèle-t-il encore, Lui est son égal. Le Père est Dieu, le Fils est Dieu, l’Esprit-Saint est Dieu ; mais ces trois personnes ne sont qu’un seul Dieu.
Au lieu de contempler ce mystère, il me semble que nous pouvons avoir tendance à le fuir, à le réduire. Comme un amateur de musique se contentant de chansonnettes alors qu’une symphonie grandiose lui est proposée, nous pouvons préférer penser un dieu accessible à tous, facile à comprendre, mais réduit dans son mystère ; un Dieu créateur, une force cosmologique, une puissance d’amour, mais pas davantage.
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Ayons donc aujourd’hui le courage de rendre témoignage au mystère de la Sainte Trinité ! Un mystère qui nous est offert non pas pour compliquer notre foi et la rendre inaudible aux autres ; mais au contraire pour élever nos âmes et nous offrir cette grâce formidable d’entrer dans la vie-même de Dieu ! C’est là que se trouve caché tout le sens de notre vie, qui n’attend qu’à se révéler à nous. Car c’est seulement à partir de la Trinité que nous pouvons comprendre totalement de quoi nous sommes faits et pour quoi nous sommes faits.
Sincèrement : quels sont les désirs les plus grands qui nous habitent ? N’est-ce pas d’aimer et d’être aimés, autrement dit : de vivre des relations authentiques, jusqu’à la plus comblante que sera la vie éternelle en Dieu ?
Nous sommes faits pour la relation ; des relations qui nous soutiennent, qui nous font du bien, qui nous grandissent, qui nous consolent ; des relations par lesquelles notre vie prend du sens, en cherchant le bonheur des autres et en les soutenant dans leurs souffrances. Personne d’entre nous ne désire autre chose !
Or, ces désirs forts de relations vraies, c’est dans la Trinité qu’ils trouvent leur source. Car la Trinité, c’est ce mystère de relation qui unit le Père au Fils dans l’Esprit, de toute éternité, avant-même la création du monde.
Et nous, nous avons été créés à l’image et à la ressemblance de Celui qui est toute-Relation ; nous avons été sauvés, rétablis dans la grâce, ouverts à l’éternité, par Celui qui est toute Relation. C’est pourquoi ce grand élan est inscrit en nous : donner de nous-mêmes comme Dieu se donne de toute éternité, au sein de la Trinité.
Nous savons, a contrario, qu’en voulant garder pour nous-mêmes, nous gâchons les plus belles occasions de nos vies et nous risquons même de nous perdre éternellement. Le Christ nous prévient : « Celui qui perd sa vie la gagne ; celui qui veut la garder en ce monde, la perd pour la vie éternelle ».
Parce que Dieu est Trinité - relation éternelle de don du Père au Fils, et du Fils au Père, dans l’Esprit qui est don - Dieu perd éternellement sa vie pour la donner sans cesse et la recevoir sans cesse.
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Alors, la fête de la Trinité nous appelle à revoir notre manière d’être en relation avec les autres : nous pensons trop souvent que c’est en attirant à nous-mêmes que nous allons gagner quelque chose ; mais nous nous éloignons alors de la manière d’être de la Trinité, donc nous nous éloignons de ce qui est notre bonheur. Car la logique de Dieu n’est pas celle de la terre.
Fêter la Sainte Trinité, c’est donc nous demander résolument quelle logique nous voulons suivre : celle du monde, pour attirer à nous et profiter des autres ? Ou celle de la Sainte Trinité, pour se donner sans jamais revenir en arrière ?
La logique de Dieu n’est pas celle du monde. Et comme pour nous le faire percevoir, le Seigneur nous appelle à dépasser notre logique comptable : 1 égale 3. Dieu n’est pas un théorème de mathématiques, il est l’Amour éternel, et quand on aime, on ne compte pas… ou plutôt, quand on aime, on est ouvert à l’autre : on ne peut pas s’aimer tout seul. Dieu, de toute éternité, aime sans s’aimer Lui-même mais il aime en Lui-même, Père, Fils et Saint-Esprit. 1 égale 3.
Mais on ne peut sans doute pas comprendre vraiment ce mystère de la Trinité si l’on reste à l’extérieur. Pour entrer dans ce mystère, il faut donc entrer en Dieu, épouser la logique de Dieu, vivre en communion avec Dieu. C’est ce que nous a offert notre baptême ; c’est ce que nous offre continuellement l’Eucharistie.
Maylis, Louis et Alexandre vont communier aujourd’hui pour la première fois ; ils vont expérimenter ce que nous vivons de manière peut-être un peu trop banale, nous qui communions régulièrement : quand le Christ ressuscité se fait nourriture et vient demeurer en nous, c’est nous qui allons, pour ainsi dire, demeurer dans la Sainte Trinité. Nous voici donc unis au Père, par le Fils, en étant rempli de l’Esprit-Saint.
Toute communion devrait être pour nous un accueil conscient de la Sainte Trinité. La Première Communion de Maylis, de Louis et d’Alexandre peut donc nous aider aujourd’hui à en prendre davantage conscience et à renouveler notre action de grâce pour un tel bienfait.
Pourquoi nous contenter de peu quand le Seigneur nous offre tellement ?
Embrassons aujourd’hui le mystère de la Trinité ; communions à ce mystère, et notre vie sera tellement plus belle, plus utile et vraiment orientée vers notre vocation éternelle : celle d’habiter la Sainte Trinité. Amen.