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Friday 8 September - Fête de la Nativité de la Vierge Marie
Il est grand, le mystère de la petite Marie
Par le père Ludovic Frère, recteur du sanctuaire.Fête de la Nativité de la Vierge Marie – Vendredi 8 septembre 2017
Homélie du Père Ludovic Frère, recteur du sanctuaire
Il est grand, le mystère de la petite Marie
« Il est grand le mystère de la foi ! »
J’aime cette proclamation, juste après la consécration. Ce n’est pas la seule formule proposée par la liturgie pour ce qu’on appelle « l’anamnèse » ; mais j’ai personnellement une nette préférence pour celle-ci : « il est grand, le mystère de la foi ! » Parce que cette expression manifeste autant notre émerveillement que notre humilité devant le mystère qui nous est donné en partage. J’aime cette expression, aussi, parce qu’elle ne vise pas seulement l’Eucharistie ; c’est toute la Révélation chrétienne, qui est ce grand mystère poussant à l’émerveillement et à l’humilité. « Il est grand le mystère de la foi » … n’entendez-vous d’ailleurs pas dans cette expression un écho aux premières notes du Magnificat ?
« Mon âme exalte le Seigneur, exulte mon esprit en Dieu mon Sauveur !
Il s’est penché sur son humble servante ».
Ce que Marie chante dans son Magnificat, c’est ce qu’elle vient de vivre à l’Annonciation. Mais c’est aussi ce qu’elle vit depuis sa naissance : le Seigneur s’est penché sur son humble servante, penché sur sa conception pour la rendre immaculée, penché sur son berceau pour préparer une demeure digne du Fils éternel qui prendra chair en elle !
Marie est ainsi la plus belles de toutes les créatures du monde. Mais cette beauté qu’elle est elle-même, elle ne la contemple pas pour elle-même. Son Magnificat n’est pas un selfie, par lequel Marie retournerait l’objectif sur sa personne afin de s’admirer. Le bienheureux Marie-Eugène de l’Enfant Jésus dit que c’est d’ailleurs une différence essentielle entre Lucifer et la Vierge Marie : cet ange de toute beauté se savait beau, et il a retourné sa beauté sur lui-même. Marie, elle, ne ramène jamais sa beauté à sa propre personne ; elle la donne à contempler, comme Benoîte en a été ici un témoin privilégié.
Alors, la Vierge Marie est bien « l’anti-selfie » par excellence ! Sa beauté est tournée vers nous, depuis le jour de sa naissance, pour que nous puissions nous en réjouir ; et même plus, pour que nous ayons part à cette beauté.
* * *
Mais elle est tellement difficile à décrire, cette beauté inégalable, que depuis 2000 ans, on cherche à l’exprimer surtout à travers des symboles, des icônes et des expressions paradoxales, qui évitent justement de réduire le mystère.
On n’a donc jamais cessé, au cours des siècles, de peindre Marie en icône ; une icône, c’est comme une porte d’entrée, qui donne accès au mystère de la beauté cachée. De même, les expressions paradoxales pour dire Marie ne sont pas que des figures de style, mais ce sont des fenêtres ouvertes sur le mystère de sa vocation.
Ainsi, par exemple, une hymne du temps de l’Avent, l’Alma Redemptoris Mater, nous fait chanter : « Sainte Mère du Rédempteur, tu as enfanté, ô merveille, celui qui t’a créée ». Et la liturgie byzantine s’étonne : « Celui qui est dans le sein du Père, comment peut-il être dans les bras d’une mère ? » Voyez que c’est tout le mystère trinitaire qui transparait dans la personne de Marie ; tout le mystère de l’incarnation et du salut, donné à voir dans le cœur et le corps de la Vierge. Et devant ce mystère, même les cœurs les plus durs peuvent être saisis et s’incliner. « Il est grand le mystère de la foi ! »
« Tu as porté celui qui porte tout », chante-t-on d’une telle Mère !... Les mots cherchent à dire quelque chose de Marie, mais c’est toujours pour nous conduire plus profondément au mystère de la Sainte Trinité. D’ailleurs, un contemporain de Benoîte Rencurel, saint Louis-Marie Grignion de Montfort, écrit dans son « traité de la vraie dévotion » : « J’avoue, avec toute l’Église, que Marie n’étant qu’une pure créature sortie des mains du Très-Haut, comparée à la Majesté infinie de Dieu, elle est moindre qu’un atome, ou plutôt n’est rien du tout, puisque Lui seul est ‘Celui qui est’ (…) ». C’est vraiment le fondement de toute spiritualité mariale : nous ne « déifions » jamais la mère de Jésus, bien entendu, et quand le risque se présente, c’est Marie elle-même qui, par son cœur immaculé, oriente le nôtre vers le cœur de son Fils.
Mais Grignion de Montfort poursuit : « Je dis cependant que Dieu ayant voulu commencer et achever ses plus grands ouvrages par la Très Sainte Vierge depuis qu’il l’a formée, il est à croire qu’il ne changera pas de conduite dans les siècles des siècles[1]. » Il est donc bien grand, le mystère de la petite Marie, depuis que Dieu l’a voulue comme Mère de son Divin Fils !
* * *
Cette femme, nous la contemplons aujourd’hui, dans sa naissance. Elle a peut-être le nez de sa maman, le menton de son papa. Tous ces traits génétiques seront nécessairement aussi ceux de son fils Jésus. Ils y penseront certainement, les 12 apôtres, après l’Ascension du Seigneur. Car ils auront toujours auprès d’eux la Vierge Marie, et ils retrouveront en elle les traits de Jésus : la forme de son visage, la beauté de son regard… tout en Marie leur rappelera Jésus et préparera leur cœur à le rejoindre au Ciel pour l’éternité.
Dans sa grande encyclique Redemptoris Mater – la Mère du rédempteur - , en 1987, Saint Jean-Paul II écrivait : « Dès le premier moment, l’Église ‘regardait’ Marie à travers Jésus comme elle ‘regardait’ Jésus à travers Marie[2]. »
Ainsi, dans la nativité de Marie, nous regardons déjà la nativité de Jésus… un avant-goût de Noël en ce début d’année scolaire, comme pour nous convaincre qu’il n’y a pas un instant de notre vie sans que la beauté de Dieu ne nous soit donnée à voir, sous les traits de la Belle Dame Marie.
Belle Dame du Laus, bon anniversaire ! En vous fêtant aujourd’hui, pouvons-nous oser vous demander que ce soit vous qui nous fassiez un cadeau ? Le cadeau d’avoir part à la beauté de Dieu comme vous y avez part, sans lui faire obstacle, sans faire barrage à la lumière. Notre-Dame du Laus, refuge des pécheurs, priez pour nous. Amen.