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Saturday 11 May - Samedi de la 7e semaine de Pâques - Première communion de Clémence et Aymeric
"Demandez et vous recevrez !"
Par le Père Ludovic Frère, recteur du sanctuaire
« Demandez et vous recevrez ; ainsi, vous serez comblés de joie ». C’est la promesse que Jésus vient de nous faire, la promesse que la Vérité en personne vient de nous faire. Il ne peut donc pas mentir, il ne peut pas nous tromper : si Jésus le dit, il le fait. « Demandez et vous recevrez ; ainsi, vous serez comblés de joie ».
N’est-il pas formidable d’avoir un Père éternel qui nous dit : « demandez et vous recevrez » ? N’est-pas réconfortant d’avoir un Dieu qui veut que nous soyons « comblés de joie » ?
Mais attention, comme dans toute relation, celle que nous avons avec le Seigneur peut être instrumentalisée, c’est-à-dire utilisée non pas pour l’amour comme devrait l’être une relation vraie, mais pour la possession, la domination, l’existence égoïste.
Si nous pensons pouvoir utiliser Dieu quand il nous dit « demandez et vous recevrez », afin d’obtenir l’exaucement du moindre de nos désirs, nous faisons fausse route. Le Seigneur n’est pas au service de tous nos désirs ; il est au service de notre joie, une joie comblante. Et certainement que tout ce que nous désirons ne nous comble pas, voire parfois crée en nous des vides encore plus profonds.
« Demandez et vous recevrez » : pour que cette promesse soit véritablement l’expression de notre relation d’amour avec le Seigneur, il faut donc bien discerner ce que nous devons lui demander.
* * *
Et voilà qu’aujourd’hui, Aymeric et Clémence ont obéi à cette parole de Jésus, qui nous dit : « Demandez et vous recevrez » ; ils ont demandé et ils vont recevoir. Ils ont demandé à recevoir l’Eucharistie, une demande qui est belle et bonne, qui est pour la vérité de la relation et pour leur plus grande joie.
On sait pourtant qu’avec un regard uniquement fixé sur les biens et les honneurs de la terre, venir participer à la messe et communier au Corps et au Sang du Christ, ça ne semble pas apporter grand chose. Et beaucoup sont d’ailleurs convaincus que ça ne sert à rien ; même des croyants. Dans l’histoire du Laus, on voit Benoîte Rencurel discuter avec un religieux ermite.
Les Manuscrits du Laus écrivent que cet ermite « demande à Benoîte […] s’il ne valait pas mieux prier Dieu dans sa chambre plutôt que d’aller à la messe. "Non, dit-elle, car le sacrifice de la messe est d’un mérite infini ; il n’est qu’un et il est commun au prêtre et à ceux qui l’entendent et qui doivent y unir leur cœur, leur intention, leur volonté à la sienne, tout au long de la messe" ». Et la bergère du Laus, dans sa simplicité, interpelle le religieux : « Mon bon frère, pour une raison qui me saute aux yeux, ne sortez-vous pas de votre cellule pour chercher de quoi vivre ? Ne courrez-vous pas deci et delà, où l’on se dissipe le plus souvent pour ne pas être toujours recueilli en soi-même ? […] Ne sortez-vous pas de chez vous pour aller chercher de quoi vivre ? » Et elle conclut : « si, pour cette misérable vie, qui n’est que passagère, nous prenons tant de soin pour la conserver, que ne devons-nous pas faire pour le spirituel ? »1.
Prendre le temps de venir participer à la messe, et s’unir ainsi au sacrifice de Jésus qui a donné sa vie sur la croix pour nous sauver du mal et de la mort, c’est incontestablement exigeant. Aujourd’hui, Aymeric et Clémence, vous êtes venu y participer avec joie, évidemment. Mais il y a aura des jours où vous viendrez avec moins d’enthousiasme…. Demandez à certains qui sont là…
Et il y a des jours où vous vivrez l’Eucharistie sans trop y penser, alors que c’est un mystère tellement grand : Dieu qui se donne en nourriture… et nous, par distraction, nous le mangeons parfois comme on fait d’un simple morceau de pain. Mais non, c’est Jésus ! S’il vient en nous, c’est pour nous transformer. S’il fait de notre corps sa demeure, sa maison, c’est pour y être bien accueilli, fêté à chaque fois comme on reçoit chez soi le meilleur de ses amis, le Roi de l’univers !
Si Jésus se donne dans l’Eucharistie, c’est pour qu’avec sa présence en nous, à notre tour, nous nous donnions, sans rien garder pour nous…. Comme la Vierge Marie, qui a tout donné dans son « oui » ! Marie et l’Eucharistie sont liés ; Marie nous aide à vivre l’Eucharistie. C’est pourquoi, il est vraiment beau de faire sa première communion dans un lieu choisi par Marie.
* * *
« Demandez, vous recevrez » : Aymeric et Clémence ont demandé à recevoir la communion, parce que c’est Jésus lui-même qui nous a demandé de le recevoir : « vous ferez cela en mémoire de moi », avait-il dit à ses amis au soir du Jeudi Saint.
Et finalement, nous comprenons qu’une demande est belle, elle est bonne et vraie, quand elle rejoint la demande que Jésus fait lui-même. Toutes nos demandes, il les a précédées ; et quand nous lui demandons quelque chose, nous manifestons en fait notre accord pour que sa volonté puisse informer et convaincre la nôtre, lui qui sait ce qui est vraiment bon pour nous.
C’est ça la prière ; ce n’est pas déranger Dieu pour qu’il nous exauce, parce que nous aurions trouvé les bons mots pour l’en persuader ! Non, la prière, c’est rejoindre la demande que Jésus a déjà faite pour nous au Père ; c’est donner notre accord à cette demande, comme Aymeric et Clémence donnent aujourd’hui leur accord pour répondre à la demande de Jésus : « faites cela en mémoire de moi ».
Et c’est pourquoi le Seigneur continue en disant : « ainsi, vous serez comblés de joie ». Pas simplement : vous aurez un peu de joie, jusqu’à ce qu’un nouveau désir, une déception ou une épreuve vienne la ternir ou la faire disparaître. Non, « ainsi, vous serez comblés de joie ». Comblés : ça veut dire qu’il n’y a plus de place en nous pour autre chose que pour la joie qui vient du Christ. Quand on est comblé, on est plein, on est rempli : plus de place pour autre chose que pour la joie de Dieu !
C’est ce que Clémence, Aymeric et nous tous allons vivre dans cette Eucharistie comme à chaque Messe. Car, lorsque l’Esprit-Saint vient nous envahir totalement par notre communion au Christ ressuscité, nous sommes vraiment comblés. Comblé de Celui qui est, de toute éternité, la joie du Père et du Fils : l’Esprit-Saint.
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Alors, merci, Clémence et Aymeric : car, par votre première Communion aujourd’hui, vous nous aidez tous à ne pas vivre l’Eucharistie de ce jour de manière banale, distraite, ou en regardant notre montre dans l’espoir que ça finisse assez vite.
Vous nous aidez à reconnaître que, dans la Communion, Jésus nous donne en fait tout ce que nous demandons au plus profond de notre cœur. Vous nous aidez à accueillir l’Esprit qui nous rejoint et qui nous remplit totalement à chaque Eucharistie. Vous nous aidez à reconnaître la volonté du Seigneur, qui est de venir reposer en nous, pour nous guérir, pour nous désolidariser du péché, pour nous illuminer de l’intérieur et faire sortir de nous l’amour qu’il vient déposer en nous à chaque Eucharistie. Vivons donc tous cette messe comme une Première communion, avec l’aide de Benoîte, qui disait : « sachez entendre la messe autant qu’il sera en votre pouvoir ; elle n’a jamais fait perdre une journée à personne »2. Amen.
1 CA G. p. 82 VI [128] – année 1673
2 CA G. p. 83 VI [129] – année 1673