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Wednesday 20 May -
6ème semaine du Temps Pascal
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Mercredi 20 mai 2020 - 6e Semaine du Temps Pascal
Homélie du père Ludovic Frère, recteur du sanctuaire
Beauté et force de la vérité
Si vous suivez les messes quotidiennes, ou si vous méditez l’évangile de chaque jour, vous aurez remarqué combien le Christ nous prépare, ces jours-ci, à ce que nous allons célébrer bientôt : l’Ascension et la Pentecôte.
Le tout comme une grande promesse, où l’Esprit Saint nous est révélé comme un Défenseur, une Force, un Consolateur, une Présence indéfectible. Aujourd’hui, l’Esprit Saint nous est promis comme une lumière éclairant nos intelligences et nos cœurs, puisque Jésus dit de Lui : « il vous guidera vers la vérité tout entière ». C’est un appel, non seulement à vouloir bien faire fonctionner notre matière grise pour penser juste – ce qui est déjà très nécessaire – mais aussi à nous mettre à disposition de l’Esprit Saint pour qu’Il puisse nous saisir et nous éclairer. Il n’y a qu’ainsi que nous avançons vraiment vers la « vérité tout entière », nous dit Jésus.
Je suis alors convaincu que saint Paul, dans la première lecture, a pris beaucoup de temps pour invoquer l’Esprit Saint avant de faire ce grand discours à Athènes. La façon dont l’Esprit Saint éclaire l’apôtre peut d’ailleurs nous donner de grandes clés pour nous aussi. Des clés bien utiles pour savoir comment parler de notre foi aux autres, comment en témoigner auprès de vos enfants ou petits-enfants qui ont peut-être lâché tout cela…
Regardons alors comment l’Esprit Saint agit dans l’apôtre Paul.
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En premier lieu, il le rend capable de rejoindre les autres là où ils en sont, dans leurs préoccupations. L’Esprit qui conduit à la vérité tout entière, ce n’est pas l’Esprit qui demande de plaquer la vérité hors du réel. Notre première charité envers les autres consiste donc à vouloir comprendre ce qu’ils vivent, pour les rejoindre dans leur vécu et leur manière de penser. Sinon, la vérité vient faire violence et elle n’est plus un fruit de l’Esprit Saint. Nous en avons sans doute déjà fait l’expérience, en voulant dire à quelqu’un ses 4 vérités, sans charité, sans nous laisser guider par l’Esprit Saint : la vérité est alors devenue une agression, que l’autre n’a pas pu accueillir ; ça n’a pas porté de fruits.
Guidé par l’Esprit Saint, saint Paul, lui, commence non par parler, mais par regarder : il se balade au milieu des temples d’Athènes, et il remarque un temple au « dieu inconnu ». L’Esprit Saint lui donne alors ce coup de génie de dire aux Athéniens que ce dieu inconnu, lui Paul, le connaît puisqu’il s’est révélé en Jésus-Christ. Voilà comment l’Esprit Saint fait rejoindre la vie des autres.
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Mais le véritable coup de génie de l’Esprit Saint en Paul, c’est de le faire passer de la conception d’un dieu parmi d’autres à la reconnaissance du seul vrai Dieu. Si l’apôtre en était resté à dire : « ce temple au dieu inconnu, appelons-le temple de Jésus-Christ »… eh bien, il n’aurait pas été fidèle à la vérité, car le Dieu trinitaire ne peut être considéré comme une divinité parmi d’autres.
Alors, l’Esprit Saint permet à Paul à la fois de rejoindre ses interlocuteurs et de les élever à quelque chose de plus grand : voilà les deux grandes dimensions du témoignage évangélique. S’il n’y a pas ces deux dimensions ensemble, nous ne sommes pas au service de l’Esprit Saint : rejoindre et élever.
Autrement dit : rejoindre les autres, ce n’est pas les laisser là où ils en sont, en se disant : chacun sa vérité, du moment que celle des autres ne dérange pas la mienne, et réciproquement. Non, si l’on aime les autres, on veut pour eux la vérité. Alors, c’est par charité qu’on cherche à les conduire plus loin dans cette vérité. Mais toujours l’humble vérité qui veut servir et élever.
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Ainsi, l’Esprit Saint guide saint Paul pour qu’il cite des philosophes grecs : il met en valeur ces penseurs qui ont eux-mêmes reconnu une source d’où découle tout bien, toute vie ; Un Dieu unique et non une multitude de petites divinités créées pour se rassurer. Saint Paul ne dit pas : « vous vous trompez, effacez tout, et voilà Jésus-Christ ». Non, il leur dit plutôt : « Par votre goût de la vérité, vous servez Jésus-Christ sans le connaître ; eh bien moi, je viens vous faire connaître celui que vous cherchez et que vous servez déjà ! »
Je vous invite à essayer de faire de même avec vos voisins, amis, enfants ou petits-enfants qui n’ont pas la foi. Non pas en vous approchant d’eux avec arrogance, ou par la menace, ou par le mépris pour ce qu’ils vivent et pensent. Mais en leur disant : c’est beau, ton goût pour le bien, pour le partage, pour la beauté, pour la réussite… mais je te propose de connaître Celui qui est à l’origine de tout cela, Jésus-Christ.
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Ainsi, la vérité n’est pas une cause à défendre, mais une Bonne Nouvelle à servir. C’est pourquoi saint Paul va jusqu’à la confession de la résurrection du Christ. Je pense qu’il savait très bien qu’en en restant à des généralités et à la mise en valeur des philosophes de l’époque, il aurait été applaudi. Mais l’apôtre est au service du Christ ressuscité, non de sa réussite personnelle pour convaincre les autres. Attention, ça peut nous arriver dans la foi : on veut convaincre les autres qu’on a raison, plus qu’on a le souci de servir le Christ ressuscité !
Alors, saint Paul se laisse toujours plus saisir par l’Esprit de vérité pour témoigner de la résurrection du Christ. Il ne cherche pas les applaudissements, la popularité ; il cherche à servir la vérité de Dieu si bon qu’il se donne pour nous libérer du mal et de la mort !
Dans notre monde actuel, qui fonctionne beaucoup sur la popularité, notamment numérique, l’enjeu est donc pour nous essentiel : l’Esprit Saint nous maintient dans le désir de servir la vérité, et non pas de rechercher notre popularité personnelle ou celle de l’Église.
Croire à la vérité, sans en avoir peur, mais sans non plus l’imposer de force : c’est l’équilibre permanent que seul l’Esprit Saint peut maintenir en nous, pour que nous soyons des serviteurs et des servantes de la Bonne Nouvelle de Pâques. Une nouvelle si grande ! Une annonce qui répond tellement à toutes les attentes du cœur humain, qu’il nous est impossible de la taire : « Christ est ressuscité, Alléluia ! »