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dimanche 25 novembre - Une royauté qui ne sera pas détruite
34ème dimanche du temps ordinaire Solennité du Christ Roi de l'Univers
Par Par le Père Ludovic Frère, recteur du sanctuaireUne royauté qui ne sera pas détruite
C’est alors que la royauté du Christ éclatera ! Elle rayonnera sur tout être vivant ! Elle s’imposera à tous ceux qui ne l’auront pas déjà choisie. Oui, ce jour-là, la royauté du Christ resplendira !
Alors, préparez-vous. Soyez bien là quand le Seigneur reviendra. Réjouissez-vous de ce moment à venir comme on attend l’arrivée d’un ami : « il viendra pour juger les vivants et les morts, et son règne n’aura pas de fin ». Comment ne pas tressaillir de joie à une telle annonce ?
C’est pourquoi, dans la 2e lecture, c’est l’enthousiasme : « Voici qu’il vient avec les nuées, tout œil le verra » (Ap 1,8). Affirmation précédée d’une introduction qui situe bien les choses : « Révélation de Jésus-Christ, que Dieu lui a confiée pour montrer à ses serviteurs ce qui doit bientôt advenir » (Ap 1,1). Ce qui doit bientôt advenir, il faut donc nous y préparer dans une joyeuse impatience.
Saint Jean proclame alors : « Heureux celui qui lit, heureux ceux qui écoutent les paroles de la prophétie et gardent ce qui est écrit en elle, car le temps est proche » (Ap 1,3). Oui, heureux sommes-nous d’entendre cette révélation ! Que cette joie chasse toute peur, car la venue du Seigneur sur les nuées du ciel est vraiment désirable. Tous nos beaux désirs trouveront enfin leur accomplissement quand le Christ règnera totalement, selon les paroles prophétiques de la première lecture : « Sa domination est une domination éternelle, qui ne passera pas, et sa royauté, une royauté qui ne sera pas détruite » (Dn 7,14).
Frères et sœurs, voilà ce qui va arriver. L’important n’est pas de connaître ni quand ni comment ; l’important, c’est de savoir si nous serons là, si nous serons prêts. Tout l’enjeu, c’est donc que le Christ soit déjà suffisamment Roi de nos vies aujourd’hui pour que sa domination sur tout être vivant ne vienne pas nous surprendre un jour.
S’il règne déjà sur nous, sa venue ne sera qu’un joyeux accomplissement. Mais s’il ne règne pas en nous, alors effectivement, sa domination passera par un arrachement, un douloureux arrachement ! À moins que nous le refusions et que nous choisissions de nous arracher nous-même à sa domination pour préférer l’enfer.
* * *
Mais je vous le répète : n’ayons pas peur ! Les lectures de ce jour nous appellent au contraire à l’enthousiasme. Même l’évangile, avec ce dialogue entre Jésus et Pilate, par lequel le Christ révèle que sa royauté n’est pas de ce monde. Il annonce une royauté dans l’autre monde, quand il aura tout accompli sur la croix, qu’il sortira vivant du tombeau et qu’il sera monté au Ciel pour nous préparer une place. Ce monde qui passe aura beau refuser son Roi ; sa royauté n’est pas de ce monde, mais dans l’autre. Et dans cet autre monde, elle sera totale, éternelle, resplendissante de gloire !
N’ayons donc pas peur des paroles apocalyptiques rapportées par le prophète Daniel ou l’apôtre Jean. Il n’y a aucune raison de penser a priori que nous ferons partie de ceux qui ressentiront de l’effroi devant l’avènement du Christ en gloire.
Car Celui qui viendra sur les nuées du Ciel, c’est Le même qui nous parle chaque jour dans sa Parole. C’est Le même qui nous nourrit de son corps et de son sang. C’est Le même qui aime à converser avec nous dans la prière. C’est Le même dont nous formons ensemble le corps. C’est Le même dont nous croisons le regard dans les yeux d’un pauvre. C’est Le même que nous servons en prenant soin d’un parent âgé, d’un enfant malade, d’un ado compliqué. C’est Celui-là même qui viendra pour juger les vivants et les morts. Alors, pas d’inquiétude. Aucune inquiétude si nous Le rencontrons déjà, si nous ne servons déjà ! Aucune inquiétude d’être pris par surprise.
En fait, la perspective du retour du Christ en Gloire met en lumière et interroge les priorités de notre vie présente. Frères et sœurs, à la lumière de la royauté du Christ, faites donc aujourd’hui, s’il vous plaît, un effort de vérité et de lucidité pour discerner qui règne vraiment en vous.
Ce n’est pas très compliqué : si chacune de vos pensées est présentée au Père, si chacun de vos projets est soumis au jugement de l’Esprit Saint, alors le Christ règne en vous. Mais si votre souci, c’est d’être au service de vous-mêmes ou dans le service des autres simplement parce que ça vous apporte quelque chose, comment le Christ pourrait-il régner en vous ?
Nécessairement, le coup d’état risque de faire mal quand Il viendra prendre sa place légitime de Roi de l’univers. Le trône des superbes sera renversé pour que le Christ vienne siéger sur son trône de gloire. Cette place, il se l’est acquise au cœur de nos vies par l’offrande de la sienne sur la croix et par sa résurrection au 3e jour. Ne lui volons donc pas la place qui est la sienne ! De toute façon, il viendra la reprendre pour juger les vivants et les morts, et son règne n’aura pas de fin. Pas de fin, contrairement à toutes les couronnes de la terre.
« Ma royauté n’est pas de ce monde », vient de dire Jésus à Pilate. Dans ce monde, nous choisissons nos royautés sociales et intérieures ; dans l’autre monde, c’est le Christ qui règnera sur tout, en tous et entre tous. Si nous ne préparons pas ce changement de régime, il nous surprendra « comme un voleur », dit Jésus.
* * *
Frères et sœurs pèlerins, vous voici justement dans un sanctuaire voulu par la Vierge Marie pour la conversion des pécheurs. C’est-à-dire que notre mère a pensé ce lieu pour nous faire quitter par choix nos petits trônes afin que nous n’en soyons pas détrônés quand le Christ reviendra dans la gloire.
La Vierge Marie a voulu que nous choisissions ici dans la douceur ce qui adviendra un jour par la force du bras de son Fils. Dans la douceur, mais avec la ferme décision de Le laisser enfin régner en toute chose : sur nos sentiments, nos pulsions, nos désirs, nos projets, nos relations, nos comptes en banque. Qu’il règne dès maintenant pour nous soyons déjà à lui quand il viendra régner éternellement.
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Pourtant, en saisissant le bazar intérieur qui peut nous habiter, nos soucis multiples et nos difficultés à changer vraiment, l’inquiétude peut revenir : Et si je n’étais pas prêt au retour du Seigneur ? Rassurez-vous, notre Roi demande tout mais exige peu : l’important, c’est seulement de vouloir qu’il règne sur nous. Pour cela, il nous offre d’abondantes grâces. Des grâces non pas comme des récompenses mais comme un ajustement par En-Haut à sa royauté.
Des grâces sacramentelles surtout. Mais aussi la grâce de la maternité de Marie. Recevoir la Vierge Marie comme notre Mère et lui confier tout ce que nous sommes, c’est donc le moyen le plus sûr pour nous ajuster au Christ notre Roi. Dans l’histoire du Laus, ce sont les anges qui encouragent Benoîte : « un ange lui apparut et lui dit : "Disposez-vous, ma sœur, par des prières, à recevoir la visite de la Reine de l’univers". » Les manuscrits du Laus l’appellent encore « la Reine du ciel et de la terre, l’avocate générale des pécheurs. »
Oui, la Reine de l’univers, la Reine du ciel et de la terre sait nous conduire au Roi des rois. Elle sait transformer tout ce qui est parfois assez médiocre en nous pour le faire resplendir aux yeux du Roi de l’univers de sa propre beauté maternelle, comme saint Louis-Marie Grignon de Montfort le disait du temps de Benoîte, dans cette belle histoire que je vous propose pour conclure :
« C’est un pauvre paysan qui, pour payer son fermage au roi, n’a en main qu’une pomme véreuse. Avec un si piètre tribut, il a toutes les chances d’être rejeté par son maître. Mais si pauvre soit-il, il a au moins une immense richesse, celle d’être un ami intime de la reine. Cette dernière, toute remplie d’affection pour l’humble paysan, ne va pas manquer d’arranger les choses : Amie du pauvre paysan et respectueuse envers le roi, n’ôterait-elle pas de cette pomme ce qu’il y a de véreux et de gâté et ne la mettrait-elle pas dans un bassin d’or entouré de fleurs ? Et le roi pourrait-il s’empêcher de la recevoir, même avec joie, des mains de la reine qui aime ce paysan ? »
Frères et sœurs, soyons nous aussi de pauvres paysans amis de la Reine, et c’est elle-même qui fera resplendir nos vies devant le Roi de l’univers quand il viendra pour juger les vivants et les morts et que son règne n’aura pas de fin. Maranatha, viens, Seigneur Jésus !