Benoîte Rencurel, messagère de la réconciliation

Benoîte, une jeune fille comme les autres

1647 : Benoîte Rencurel voit le jour à Saint-Etienne d’Avançon au sein d’une modeste famille. Contemporaine du roi Louis XIV, elle va vivre une époque troublée par les tensions politiques, sociales et religieuses.

Après la mort de son père en 1654, elle se voit contrainte de travailler comme bergère. Avant de commencer à parcourir les montagnes avec ses troupeaux, elle demande à sa mère un chapelet. Ne sachant ni lire ni écrire, elle prie à longueur de journées et devient ainsi une vraie contemplative.

Simple et pleine de vie, elle est proche des gens de son village et n’hésite pas à donner sa nourriture aux enfants plus pauvres qu’elle.

1664 : début d'une longue relation

Mai 1664 : après avoir entendu une homélie de son curé, Benoîte ressent le profond désir de rencontrer la Mère de miséricorde.
Peu après, saint Maurice lui apparaît et lui annonce que son vœu sera exaucé.

À partir du lendemain, une « belle dame » lui apparaît quotidiennement pendant quatre mois au Vallon des fours, à proximité de Saint-Etienne.
Pour la préparer à sa future mission, elle lui apporte une éducation intensive qui transforme son comportement et sa vie spirituelle.

Le 29 août, la belle dame révèle son identité : « Je suis Dame Marie, la Mère de mon très cher Fils. »

Fin septembre, après un mois d’absence, Marie se manifeste à nouveau, mais de l’autre côté de la vallée, à Pindreau : 
« Allez au Laus, vous y trouverez une chapelle d’où s’exhaleront de bonnes odeurs, et là très souvent vous me parlerez ».

Un vallon choisi comme refuge pour tous

Le lendemain, Benoîte se rend au hameau du Laus tout proche et trouve la chapelle de Bon-Rencontre grâce aux parfums.
À l’intérieur, debout sur l’autel, Marie lui dévoile son projet : 
« J’ai demandé ce lieu à mon Fils pour la conversion des pécheurs 
et Il me l’a accordé ».

Elle confie à Benoîte la mission de faire construire une église
et une maison pour les prêtres afin qu’ils reçoivent et confessent les pèlerins.  

Recouvrant la chapelle de Bon-Rencontre, l’église est édifiée entre 1666 et 1669. Le jour de sa bénédiction, Benoîte devient membre du tiers-ordre de saint Dominique, d’où le titre de « sœur Benoîte » qui lui sera donné.

Benoîte, témoin de la miséricorde pendant 54 ans d'apparitions

Dès le printemps 1665, les pèlerins affluent au Laus.
Ils seront environ 130 000 en 18 mois.

Benoîte remplit auprès d’eux son ministère d’accueil, de prière
et de pénitence. Ayant reçu le don de pouvoir lire dans les consciences, elle éclaire leur démarche de conversion et les envoie vers les prêtres émerveillés par la qualité des confessions.

Les guérisons et les conversions sont très nombreuses. Entièrement vouée à sa mission, Benoîte vient résider à plein temps au Laus en 1672.  

Pendant 54 ans, Marie continue de lui apparaître pour la soutenir dans son apostolat et poursuivre son éducation.

Benoîte, mystique de la compassion

En plus des apparitions mariales, Benoîte voit également des anges, plusieurs saints, et connaît des expériences mystiques comme la vision du Paradis.

Entre 1669 et 1684, elle est gratifiée 5 fois de la vision du Christ crucifié sur la croix d’Avançon. Ainsi unie à lui, elle vit une « crucifixion mystique » chaque vendredi pendant plusieurs années.

Elle traverse d’autres épreuves comme des attaques spirituelles
et physiques du démon ou une mise à l’écart par des prêtres de tendance janséniste pendant 20 ans.

Épuisée par ces luttes et son dévouement, elle décède
« joyeusement » le 28 décembre 1718, entourée des prêtres du sanctuaire.

La reconnaissance officielle des apparitions

Des apparitions reconnues implicitement depuis le début du pèlerinage...

Bien que le pèlerinage du Laus ait été autorisé dès le mois de septembre 1665 par l'archevêque d'Embrun, les apparitions en elles-même n'avaient jamais fait l'objet d'une reconnaissance officielle par l'Eglise.

C'est en 2005, dans le cadre de l'instruction du procès de béatification de Benoîte, que ce constat est fait.

Le 16 juin 2005, Mgr Jean-Michel di Falco écrit donc à la Congrégation pour la doctrine de la foi afin de connaître la démarche à suivre pour permettre la reconnaissance du caractère surnaturel des apparitions du Laus.

La réponse, datée du 22 novembre 2005, précise les normes pour juger du caractère surnaturel des apparitions. Il s'agit d'établir trois commissions: théologique, historique, et scientifique. Le 15 janvier 2007, la synthèse de leur rapport est envoyée à Mgr di Falco Léandri, qui soumet son jugement à la Congrégation pour la doctrine de la foi. 

Après l'assentiment de cette dernière, l'évêque de Gap et d'Embrun promulgue le décret de reconnaissance le 4 mai 2008, au cours d'une messe célébrée au sanctuaire en présence du nonce apostolique en France (Mgr Fortunato Baldelli), de plusieurs cardinaux et de nombreux évêques.

Evénement clé dans l'histoire du sanctuaire, le décret vient officialiser une reconnaissance implicite depuis le temps de Benoîte. Notre-Dame du Laus prend place parmi les grands lieux d'apparitions reconnues par l'Eglise. L'originalité des phénomènes qui y sont survenus réside dans leur durée :
54 ans...

La médiatisation de cet événement a aussi un impact très important sur la notoriété du sanctuaire.

Les Manuscrits du Laus

Une mine à explorer...

Les Manuscrits du Laus sont l'oeuvre de quatre auteurs, qui ont connu Benoîte dans sa vie quotidienne:

- François Grimaud, juge de la vallée de l'Avance, procureur du roi à Gap;
- Jean Peytieu, prêtre du diocèse d'Embrun, docteur en théologie, qui a vécu quotidiennement pendant vingt ans au contact de la bergère;
- Pierre Gaillard, vicaire général de Gap, aumônier du roi, auteur principal de la grande histoire du Laus;
- François Aubin, ermite au col de l'ange, confident de Benoîte.

Une histoire mouvementée...

Après la mort de Benoîte, François Aubin rassemble et conserve les quelques 1800 pages que représentent tous ces témoignages.
Puis il les transmet aux pères de la Sainte-Garde, chapelains du pèlerinage.
A la Révolution, un père de Sainte-Garde fait un paquet de ces documents et les cache dans un grenier. Cette liasse sera oubliée par les chapelains, prisonniers ou dispersés.
En 1818, les Pères oblats de Marie Immaculée prennent en charge le Laus.  L'un deux, devenu économe, découvre en 1824 le paquet précieux de ces manuscrits autographes.
En 1850, à la demande de Mgr Depéry, évêque de Gap, ils sont classés, ordonnées et recopiés par l'abbé Galvin : c'est la "Copie authentique des Manuscrits".
En 1977 paraît l'ouvrage "Benoîte, la bergère de Notre-Dame du Laus". Rédigé par le père de Labriolle, ce livre représente une avancée très importante. En effet, pour la première fois, les Manuscrits sont vraiment exploités.
En 1996, dans le cadre du procès de béatification de Benoîte (rouvert en 1981 par le pape Jean-Paul II, notamment grâce aux travaux historiques de Labriolle), cette Copie est reproduite à 500 exemplaires. Les Manuscrits du Laus deviennent ainsi un formidable outil au service des chercheurs.

Les 4 auteurs des Manuscrits

François GRIMAUD

François Grimaud est le premier témoin contemporain et biographe.

     Dans les années 1650, il devient procureur à Gap et juge de la baronnie d'Avançon,
dont dépend Saint-Etienne d'Avançon, village natal de Benoîte. En août 1664, il est donc témoin oculaire des événements et de la grande et dernière apparition au Vallon des fours, le 29 août.
C'est là que la "belle dame" révèle à Benoîte son identité: "Dame Marie".

     Durant l'enquête d'août 1664, il apparaît comme un témoin réfléchi, probe, et consciencieux,
auquel on ne raconte pas de balivernes et qui inscrit les faits avec précision. Il sait rester ferme et bienveillant, sachant faire surveiller discrètement Benoîte.

 Jean PEYTIEU

    Jean Peytieu, prêtre du diocèse d'Embrun, entre dans l'histoire du Laus et de Benoîte comme observateur dès 1665. A partir de 1669, il devient l'un des directeurs du pèlerinage.
Il le restera jusqu'à sa mort le 19 mars 1689. Pendant 20 ans, il est au coeur des événements comme témoin et acteur particulièrement dévoué.

    Dans ses écrits, il y a trois démarches essentielles :
     - convaincre l'archevêque d'Embrun (c'est l'objet de son Rapport de 1671 et 1672);
     - noter les événements au quotidien (c'est l'objet de son Journalier des années 1684 et 1685);
     - tenter d'apporter une présentation historique (c'est l'objet des Mémoires Historiques regroupées en 1688 et 1689).

    Confesseur de Benoîte et des pèlerins, il connaît les événements de l'intérieur. C'est l'intérêt essentiel de son oeuvre, celle d'un homme, d'un prêtre qui vécut les faits pendant 20 ans, au coeur des rencontres, des confidences, des témoignages.      

Pierre GAILLARD

    Il intervient directement en 1665 pour vérifier personnellement les rumeurs, puis pour s'engager profondément dans le pèlerinage et dans la vie de Benoîte dont il devient le confesseur.
    Il travaille pour le Laus de 1665 jusqu'à sa mort en 1715.
    Il est soucieux de la vérité et cherche toujours la véracité des événements auprès des autres auteurs, de la mère de Benoîte, des témoins, surtout et toujours auprès de la Servante de Dieu, à qui il relit et fait corriger tous ses écrits.
    Il est vicaire général de l'évêque de Gap, official et archidiacre, docteur en théologie et en droit canon, aumônier du roi. 
   Ses écrits occupent les 4/5 des volumes reliés des Manuscrits du Laus.

    Son originalité est de tenir compte de l'ensemble des sources, de son expérience personnelle et du témoignage direct de Benoîte.

François AUBIN

Après les différentes enquêtes (1665, 1670, 1671), l'influence du Laus ne cesse de croître. 
Les guérisons et surtout les nombreuses conversions sont à l'origine de ce rayonnement grandissant.

     Le pèlerinage s'est enraciné lorsque le frère Aubin, ermite, vient s'installer à deux lieues du Laus,
dans un ermitage dépendant de l'évêché de Gap.

     François Aubin vivra ainsi de 1650 à 1733. Il est témoin des événements; il voit, entend, écoute Benoîte, les chapelains du Laus, et les pèlerins.

     Il a cette particularité de garder l'estime des plus fidèles du Laus et d'être l'ami et surtout
le confident de Benoîte.

Chronologie: de 1664 à aujourd'hui

1647                      

Naissance de Benoîte Rencurel à Saint-Etienne d’Avançon (Hautes-Alpes).

1664                      

Premières apparitions (elles dureront 54 ans). Benoîte est éduquée par la Vierge Marie puis reçoit sa mission. Début du pèlerinage.

Benoîte se dévoue pour les pèlerins, qu’elle accueille mais aussi conseille et encourage grâce au charisme de lecture des cœurs que la Vierge lui octroie. Elle devient ainsi un instrument de Miséricorde et de conversion.

1665                      

130 000 pèlerins se rendent au sanctuaire en 18 mois. Les témoignages de guérisons et conversions se multiplient.

Le diocèse d’Embrun autorise  le pèlerinage, la construction d’une église et l’installation de prêtres.

1666 - 1669                     

Construction de l’église.

1669                     

Première apparition du Christ crucifié. Benoîte vivra les « souffrances du vendredi » jusqu’en 1684.
Elle poursuit sa mission d’accueil des pèlerins.

1689                     

Début d’une période de combat spirituel intense contre le démon.

1692                     

Exil d’un mois à Marseille suite à l’occupation de la région par le Duc de Savoie.

1718                     

Benoîte meurt « en odeur de sainteté ».

1791 - 1818                     

Le pèlerinage est interrompu suite au pillage du sanctuaire et au départ des prêtres résidents.

1850                     

Recopie des Manuscrits du Laus (1800 pages de témoignages de quatre contemporains de Benoîte), par l’abbé Galvin.

1855                     

40 000 personnes assistent à la cérémonie de couronnement de la Vierge de Notre-Dame du Laus.

1864                     

Ouverture du procès diocésain, première étape de la cause de béatification.

1892                     

L'église est élevée au rang de basilique mineure.

1913                     

La cause est stoppée par le pape Pie X car le dossier ne s’appuie pas assez sur les témoignages des contemporains de Benoîte.
Le procès pourra reprendre si des éléments nouveaux sont présentés.

1926                     

Jean Guitton se rend pour la première fois au sanctuaire.

1977                     

En s'appuyant sur les Manuscrits, le Père de Labriolle réalise un important travail de recherches qui débouche sur l'édition d'un livre (Benoîte, la bergère de Notre-Dame du Laus) et sur l'organisation d'un colloque l'année suivante.

1979                     

L’évêque de Gap adresse à Jean-Paul II une supplique pour demander la réouverture de la cause de béatification.

1981                     

Jean-Paul II lève la suspension et le procès reprend.

2005 - 2008                     

Mgr Jean-Michel di Falco Léandri entreprend des démarches pour faire reconnaître officiellement les apparitions.

2008                     

Reconnaissance officielle des phénomènes surnaturels survenus au Laus

2009                     

Reconnaissance des vertus héroïques de Benoîte, qui est déclarée vénérable.

2011                     

Février. Voyage à Rome de Mgr di Falco Léandri et du recteur du sanctuaire, le Père Frère, pour faire un point sur les avancées du procès de béatification. La Congrégation pour les causes des saints souligne la qualité du dossier et confirme qu’il ne reste plus qu’une étape à franchir : la reconnaissance d’une guérison inexpliquée obtenue miraculeusement par l’intercession de Benoîte. Le séjour à Rome permet aussi de constater que le sanctuaire Notre-Dame du Laus est désormais un haut-lieu spirituel connu et reconnu dans l’Eglise.        

1er mai. Clin d’œil de l’histoire, le sanctuaire s’unit à la cérémonie de béatification de Jean-Paul II tout en fêtant le 30ème anniversaire de la réouverture du procès de béatification de Benoîte par ce même Jean-Paul II.

2012                     

3 au 5 août : haut-lieu de réconciliation, Notre-Dame du Laus accueille le congrès national de la Miséricorde, sous la présidence du cardinal Philippe Barbarin, archevêque de Lyon.
8 septembre : le cardinal André Vingt-Trois, archevêque de Paris et président de la conférence des évêques de France vient présider la fête de la Nativité de Marie et le 120e anniversaire de l'élévation de l'église au rang de basilique mineure.