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Partir et rester
« Voulez-vous partir vous aussi ? » Si cette question du Christ concernait votre présence au Laus, il y a fort à croire que vous répondriez négativement, n’est-ce pas ? On est vraiment bien ici, dans la maison de campagne de la Vierge Marie. On n’a pas envie d’en repartir ! Pourtant, un départ interroge non seulement ce que l’on quitte, mais aussi les fondements sur lesquels on veut rester.
Alors, tout l’enjeu pour vous, aujourd’hui, c’est de partir de ce lieu de grâces sans vous éloigner de la grâce. L’enjeu, c’est de savoir terminer un temps fort, tout en reconnaissant l’importance aussi de temps plus faibles dans lesquels le Seigneur et Marie vous attendent à présent.
« Voulez-vous partir, vous aussi ? » Si c’est partir pour aller encore vers le Christ, si c’est partir en emportant Marie, alors oui, ce départ doit être joyeux et il portera du fruit. Il est un départ pour poursuivre la route, car on n’est pas sur terre pour s’arrêter en chemin ; on est là pour continuer l’immense pèlerinage en direction du sanctuaire des Cieux.
Alors, partez en paix, frères et sœurs pèlerins ; partez joyeux, mais ne partez pas de là où vous devez essentiellement rester. Ne vous éloignez pas de là où il vous faut demeurer.
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C’est bien l’enjeu de l’interpellation du Christ à ses apôtres : « voulez-vous partir, vous aussi ? » Partir ou demeurer : c’est le choix auquel Jésus accule ceux qui le suivent, comme Josué interrogeait le peuple dans la première lecture : « S’il ne vous plaît pas de servir le Seigneur, choisissez aujourd’hui qui vous voulez servir ». Choisissez : partir ou rester.
Ce choix conduit beaucoup de disciples du Christ à s’en aller. La raison de ce départ brutal, il faut la chercher dans l’évangile de dimanche dernier. Jésus révélait le mystère de son corps à manger et de son sang à boire. Devant ce mystère déconcertant, de nombreux disciples s’exclament : « cette parole est rude ! Qui peut l’entendre ? ». Cette parole, c’est celle que Jésus avait dite auparavant : « Celui qui me mange vivra par moi ». Un homme qui demande à être mangé pour donner la vie ! « À partir de ce moment, beaucoup (…) cessèrent de l’accompagner ».
Et c’est là qu’on trouve cette question : « voulez-vous partir, vous aussi ? » Interpellation vibrante du Christ à ceux qui l’ont suivi dès les débuts. « Vous, mes amis, est-ce que vous me faites confiance ? Est-ce que vous croyez que ce qui est folie aux yeux des hommes peut être la révélation de mon plus grand désir de proximité avec vous ? »
C’est tout l’élan de notre foi qui est ici interrogé : voulez-vous en rester à une foi par laquelle vous maîtrisez des concepts ou des temps de prière ? Ou est-ce que vous acceptez de vous jeter dans l’Absolu et manger Dieu, le manger pour devenir toujours plus ce Qu’il est Lui-même : tout amour !
La foi ne consiste pas à faire rentrer les paroles du Christ dans nos cadres de pensée, mais au contraire à déployer notre pensée jusqu’au mystère du cœur de Dieu ! « Tu as les paroles de la vie éternelle », confesse alors Simon-Pierre. Le chef des apôtres ne dit pas qu’il a tout compris ; mais il accepte que sa vie soit une ouverture au mystère, plutôt qu’une réduction du mystère à ce qu’il parvient à comprendre et donc à maîtriser.
La majorité des disciples veulent partir pour demeurer dans leurs certitudes. Ils sont peu nombreux à accepter de quitter ce qu’ils maîtrisent pour demeurer avec le Christ.
Et vous, au terme de votre pèlerinage au Laus, « voulez-vous partir, vous aussi ? » Allez-vous rentrer chez vous comme si de rien n’était, faisant des grâces de ce lieu une parenthèse un peu hors-sol par rapport à la réalité de votre vie ? Ou allez-vous changer, changer vraiment d’objectifs de vie, de projets, de comportements ? Allez-vous quitter ce que vous maîtrisez afin de demeurer dans le Christ ?
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Pour rester auprès de Celui qui a les paroles de la vie éternelle, continuez donc à contempler la Vierge Marie comme nous l’avons honorée au cours de ce festival.
Dès l’annonciation, Marie accepte de ne plus maîtriser sa vie. « Que tout se passe pour moi selon ta Parole ». Le mystère de la présence divine l’a saisie tout entière : celle qui a donné un corps au Fils de Dieu ne cesse alors de nous ouvrir au mystère du corps eucharistique de ce même fils. Celle qui a donné son sang et son lait à l’enfant-Dieu ne cesse de nous plonger dans le mystère du sang sauveur auquel nous communion.
La Vierge Marie, premier tabernacle du Dieu vivant, nous garde de nous éloigner un seul instant du mystère eucharistique. « Vers qui pourrions-nous aller ? » Comme Marie, grâce à Marie, nous découvrons qu’il est impossible de partir ailleurs : dans le Christ, en Lui seul, nous avons la vie ! En Lui, nous sommes rassasiés ! En Lui, nous trouvons la vraie nourriture et la vraie boisson ! En Lui, nous devons demeurer !
Marie nous le montre par toute sa vie : plus nous laissons Jésus demeurer en nous, plus nous demeurons en Lui. Impossible alors de vouloir partir ailleurs : c’est en Lui seul qu’est notre demeure, nous le savons !
« Voulez-vous partir vous aussi ? » Non, ne partez pas ailleurs ! Ici seulement, dans le Christ, vous avez votre demeure véritable, pour l’éternité. Devant le mystère de l’Eucharistie, l’exclamation du peuple hébreu devient alors le cri de toute l’Église : « Plutôt mourir que d’abandonner le Seigneur pour servir d’autres dieux ! »
Que ce soit aussi votre grand élan, frères et sœurs pèlerins, au moment de partir : partir sans jamais abandonner le Seigneur ! Quitter ce lieu de grâce, comme il faut quitter sans cesse des endroits dans notre vie, jusqu’au jour où l’on quittera la vie terrestre. Savoir quitter, savoir partir, tout en demeurant là ou il faut essentiellement rester : dans les mains du Père, dans la Présence de Jésus, remplis de l’Esprit-Saint, comme Marie, par Marie, avec Marie. Amen.